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Amara Traoré, ex-coach du diaraf : « Il y avait un climat lourd de méfiance »

Mardi 17 Février 2015

Son contrat à la tête du Diaraf n’aura duré que 9 journées. Amara Traoré a rendu le tablier samedi à l’issue de la 4ème défaite de son équipe en championnat. Le désormais ex-entraîneur du club de la Médina, qui dit être « disponible » pour l’équipe nationale, revient ici sur les raisons de sa décision et parle des ambitions pour le football sénégalais.


  J’étais venu au Diaraf pour un grand projet parce que ce club fait partie de ceux qui ont bercé mon enfance comme tout Saint-Louisien. La Linguère est notre équipe biologique mais le Diaraf, pour la plupart des aînés, c’est l’équipe par affinité. Je me rappelle, quand j’étais plus jeune, Diaraf-Ashanti Kotoko en nocturne. Ce jour-là, j’avais versé des larmes parce que j’étais supporter du Diaraf. En venant avec des amis, il y avait un projet. Youssou Dial, Youssou Lakhoum et Cheikh Seck sont venus me chercher pour un grand projet dans le temps. Quand je suis venu, on a essayé de faire du bon travail, mais une équipe c’est un tout. En personne avertie, j’ai vu qu’il manquait ce grand rassemblement qui fait que ces équipes traditionnelles doivent exister. Je ne dis pas que c’est ce qui a fait qu’on a ce genre de résultats, mais dans un passé récent, on a vu des équipes comme la Jeanne d’Arc disparaître à cause de ce genre de situation. Je ne suis pas là en donneur de leçon, mais pour l’amour et le respect que j’ai pour le Diaraf, je veux que cette démission crée un déclic.
Je veux qu’il y ait une prise de conscience pour que ce club cher aux Sénégalais se rassemble, parce qu’il y a trop de méfiance dans cette équipe. Il y a un problème de confiance alors qu’un club a besoin de cela pour survivre. Le Diaraf est un grand club avec de bons dirigeants, de bons cadres.
Avez-vous l’impression d’être lâché par le club ?
Non, non, non ! Franchement, j’ai été soutenu par les gens qui étaient là, le président Cheikh Seck, Youssou Dial, Youssou Lakhoum, les présidents de section, les joueurs, mon encadrement. Sur ce plan, il n’y a pas eu de problème, mais c’est ce climat de méfiance qui est devenu lourd. Si le club arrive à se rassembler, il va devenir encore plus grand, pas seulement au niveau national. Vu qu’il y a beaucoup de cadres. J’ai reçu tellement de messages de gens importants que si tout ce monde se retrouvait comme on le fait au Real Madrid, au Fc Barcelone, on aura un grand club, avec des moyens, des idées et beaucoup de succès. Je pense que le Diaraf ne soupçonne pas les moyens et le potentiel affectif qu’il a.
N’y a-t-il pas eu une pression trop lourde à porter ?
Je n’ai pas senti cela. Moi, j’aime la pression et les équipes où il y a de la pression, parce que cela fait avancer. Cela ne me fait pas peur. C’est mon adrénaline. En venant au Diaraf, c’était en connaissance de cause parce que je choisis mes clubs. Je n’aime pas là où c’est trop calme car je suis un compétiteur.
N’avez-vous pas peur que les gens prennent cette démission comme un aveu d’échec ?
Vous savez, je suis quelqu’un qui prend des décisions, mais je ne peux pas empêcher les gens de faire des commentaires. Dans la vie, quand tu poses des actes, les commentaires et les appréciations ne t’appartiennent pas, donc je laisse les gens commenter. A chacun son rôle, moi, je suis acteur, je joue mon film, mais l’appréciation appartient aux autres. Mais tout entraîneur perd des matches, perd une compétition et connaît des moments difficiles, même les plus grands. On a vu, par exemple, Mourinho quitter le Real, d’autres descendre en 2ème division. Moi, je suis un conquérant, un combattant, la page du Diaraf est tournée, je suis maintenant dans d’autres horizons, mais je n’exclus pas de revenir. Tant que je n’atteins pas encore l’âge de la retraite pour m’occuper de mes enfants, je resterai sur le terrain en étant très conquérant.
Donc, vous ne considérez pas votre bilan à la tête du Diaraf comme un échec ?
Non, je pense qu’on a essayé de mettre quelque chose en place parce que quand je suis venu, on a perdu presque 90% de notre effectif. On a essayé de repartir avec de nouveaux joueurs, et quand on fait face à ce genre de situation, il faut du temps pour que cela démarre. Mais cela ne m’a pas fait peur. Quand je viens dans une équipe, j’essaie toujours d’imprimer ma marque, et dans toutes les équipes où je suis passé, les gens voient toujours la marque Amara. J’essaie toujours de donner un potentiel à un joueur parce que même si le talent est inné, je suis capable de donner un potentiel, une forme à une équipe. Quand on voit le Diaraf jouer, on sent que cette équipe a quelque chose. Quand un entraîneur est capable de faire ça, cela veut dire qu’il a quelque chose ; c’est pourquoi on ne m’entendra jamais me lamenter quand j’ai une équipe qui a des blessés et des suspendus. Je pense qu’avec le temps, cette équipe allait décoller, mais j’ai démissionné parce que je suis issu d’une équipe traditionnelle qui est la Linguère de Saint-Louis et je connais les exigences d’une équipe traditionnelle. Une équipe traditionnelle ne peut pas se permettre d’avoir ces tiraillements parce que cela peut créer des problèmes. J’ai vécu cela avec la Linguère, on a vu ça avec la JA, le Mbossé de Kaolack, etc. Fort de cette expérience, j’ai préféré dire stop. J’ai voulu tirer la sonnette d’alarme pour que les gens prennent conscience.
Vous avez alors peur que le Diaraf ne connaisse la même situation que la Jeanne d’Arc et toutes ces équipes que vous venez de citer ?
C’est exactement ce que je ne veux pas, et si la situation continue comme ça, il y a de quoi s’inquiéter. Le Diaraf fait partie du patrimoine footballistique du Sénégal, c’est pourquoi j’ai essayé d’alerter à ma manière.  
Pensez-vous avoir eu les hommes qu’il fallait pour la réalisation des objectifs qui vous ont été fixés ?
Quoi qu’on dise, le Diaraf est un club structuré ; il y a un président, un président délégué, un président de section de football et il n’y a pas eu de problème avec ces gens-là, tout se passait très bien. Mais au Diaraf, il y a d’autres personnes qui sont là qui peuvent aider ce club.
En fait, je veux parler surtout d’effectif parce que l’équipe a quand même perdu son épine dorsale cette saison, le meilleur buteur, le meilleur joueur et d’autres départs…
  Non seulement l’épine dorsale est partie, mais depuis le début de la saison, je n’arrive pas à aligner l’équipe que je pensais mettre. Soit il y a eu des blessés, des joueurs suspendus et c’est ainsi à chaque match depuis que nous sommes là. Donc, tu perds des hommes en début de saison, à chaque match tu as des blessés ou des joueurs suspendus, ça devient compliqué.
Les gens ont également parlé de vos relations quelque peu conflictuelles avec certains de vos joueurs, notamment Ciré Dia, qu’en était-il exactement ?
Tu sais comment on appelle Ciré ? On l’appelle Amara Junior ! C’est mon prolongement. Mais quand on gère un club, il ne faut pas mélanger les relations professionnelles et les relations humaines. Ciré est un garçon merveilleux, mais quand on gère un club, il y a, par moments, des rappels à l’ordre. Cela ne veut pas dire que j’ai des rapports conflictuels avec mes joueurs. J’ai des relations exceptionnelles avec eux.
Vous quittez avec des regrets ?
Oui. Avec beaucoup de regrets même, parce que j’avais envie de donner beaucoup de choses au Diaraf. J’avais sincèrement des ambitions pour cette équipe parce que j’avais retrouvé le goût de me lever et d’aller aux entraînements. Mon regret, c’est ce rassemblement qui n’a pas eu lieu et qui pouvait aider ce club. Je sais que je pouvais beaucoup apporter à ce club.
Vous dites que vous vous étiez inscrit dans un projet à court ou moyen terme.
Avez-vous senti une impatience de la part du club ?
Vous savez, dans les grands clubs, même si vous avez des projets, il faut gagner. Mais je n’ai pas senti un manque de patience au niveau des dirigeants. Même pour démissionner, il fallait les convaincre. Il a fallu parler avec le président Dial pendant deux jours. J’ai même forcé la main pour qu’ils acceptent. Malgré nos résultats, le président Cheikh Seck a été lucide tout comme Youssou Dial et Youssou Lakhoum qui sont mes collaborateurs les plus proches.
A l’annonce de votre démission, beaucoup de gens ont vite fait le parallèle avec la situation de l’équipe nationale. Certains disent même qu’Amara a la tête à l’équipe nationale…
(Il éclate de rire). Vous savez, je n’ai jamais varié dans ma position par rapport à l’équipe nationale. L’équipe nationale est un patrimoine, une œuvre nationale. Ma vision de cette équipe est que tout Sénégalais, je ne dis pas seulement entraîneur, peut apporter sa contribution. Il n’y a pas un Sénégalais à qui l’on demanderait de venir aider le Sénégal dans son domaine qui dirait non. Je n’ai jamais refusé un poste pour le Sénégal. J’ai dirigé des matches de l’équipe nationale sans même avoir de contrat, contre le Lesotho en 2004, face à la Corée et contre la Norvège en 2006 parce que c’était une obligation, on n’avait pas le droit de dire non. Je serais toujours disponible pour le football de mon pays.
Aux yeux de beaucoup de Sénégalais, votre nom renvoie à la débâcle de Bata à la Can de 2012. Pensez-vous que les contextes soient les mêmes et qu’un second passage pourrait être couronné de succès ?
  Je ne peux pas rentrer dans ces détails, je dis tout simplement que je suis toujours disponible pour le Sénégal. En 2012, on a fait des éliminatoires extraordinaires, personne ne peut le nier, avec 16 points sur 18, 16 buts marqués contre un seul encaissé. Mais on n’a jugé notre parcours que sur Bata.
Or, on a impacté sur l’équipe olympique, sur les U17, sur l’équipe locale, qui étaient toutes qualifiées. Et quand on partait à la Can, tout le monde disait que cette équipe était favorite, j’étais la seule personne à dire qu’elle ne l’était pas. Si vous voyez mes interventions ces derniers mois, j’ai essayé de donner ma contribution en essayant de partager d’une autre manière avec les Sénégalais ce que j’ai vécu en 2012 pour qu’il n’y ait pas cette sorte de crise qu’on vit. J’avais dit à l’époque qu’il fallait éviter de faire croire qu’on a une grosse équipe. C’était une manière de dire au peuple qu’en football, tout peut se passer. Je ne voulais pas qu’on refasse les mêmes erreurs qu’en 2012. J’ai vu une équipe avec des jeunes accompagnés de quelques anciens et je l’ai dit avant même le tirage au sort, que cette équipe était en train de monter, mais à qui il restait pas mal de choses. Je voulais que les gens laissent cette équipe grandir.
Comment faire grandir cette équipe justement ?
Je prends l’exemple sur moi. On me reprochait souvent d’aligner 4 attaquants, mais amuse-toi à regarder si le Sénégal a des excentrés. Il n’y en a pas. Cette équipe n’a que Sadio Mané qui vient à peine d’arriver. Quand tu l’enlèves, il n’y a plus personne et tu es obligé de changer de système. Il faut qu’on soit très lucide. Maintenant, si on n’a pas d’excentré sur le plan international, on le cherche sur le plan local, et il n’y a que l’équipe nationale locale avec des regroupements périodiques, beaucoup de stages fermés et des matches qui peut nous les donner. Prenons le poste de meneur de jeu, il n’y en a pas, c’est comme en 2012. Prenons le poste de latéral droit, celui des gardiens où il n’y a que Coundoul qui est motivé et fait ce qu’il peut. Et il faut prier qu’il ne se blesse pas. C’est pourquoi quand les gens disent dans l’euphorie qu’on a une grande équipe, je dis non. Une grande équipe, c’est des postes équilibrés. La difficulté de l’entraîneur qui va venir, c’est de savoir si ses choix seront acceptés par le peuple ?
Pensez-vous que c’est possible de compter sur les joueurs locaux ?
Je pense que c’est possible. C’est possible si on a une équipe locale très forte et qu’on donne un contenu à ces garçons. Mais, je ne pense pas que ce soit au niveau des clubs qu’ils peuvent avoir ce contenu. Il faut mettre des entraîneurs nationaux, revenir à l’ancienne époque, regrouper les garçons 5 jours dans la semaine au centre Jules François Bocandé. Cela va non seulement booster le championnat, mais permettre de combler les postes où nous avons des problèmes.

Entretien réalisé par Wahany Johnson SAMBOU
Le Soleil

 

 


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