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HISTOIRE DU NAIN BOITEUX (4)

Samedi 2 Mars 2013


Ce dernier, visiblement bouleversé par la décision qu’il venait de prendre, ne cessait de faire craquer avec nervosité ses gros doigts noueux….
Lorsque son père lui annonça qu’il avait l’intention de la donner en mariage à Ndiaga Niaaw le richissime nain boiteux, Coumba Sira s’était évanouie dur le champ. Ses deux frères, Moussa et Nouha, s’étaient alors précipités pour la transpoter dans sa chambre et la ranimer en lui aspergeant de l’eau fraîche sur le visage. Quand elle eut repris ses esprits, elle avait poussé un long cri de détresse avant d’éclater en sanglots désespérés pendant que ses frères tentaient en vain de la consoler. La jeune fille avait pleuré toute la nuit et le matin très tôt, elle était allée chez son petit ami, Fadel Barry, pour lui exposer la situation.

Ce dernier, suffoquant d’indignation et de colère avait déversé sa bile sur le nain vicieux qu’il avait traité de tous les noms d’oiseaux, maudissant au passage le père de Coumba qui, toute honte bue, n’avait pas hésité à monnayer sa fille, car logiquement il ne pouvait s’agir que de cela, en espèces sonnantes et trébuchantes. Coumba Sira et lui se connaissaient depuis déjà deux ans et ils s’aimaient éperdument. En dépit des menaces de son père qui considérait le jeune homme comme un bon à rien, Coumba continuait de le fréquenter et avait fait le serment de lui être fidèle éternellement. De son côté,

Fadel vouait un véritable culte à sa fiancée qu’il appelait sa « gazelle noire aux attaches célestes » et dont il célébrait la beauté dans des poèmes d’un lyrisme délirant. En dépit de son côté un peu marginal d’artiste, avec sa casquette vissée à l’envers sur sa tête et ses dreadlocks qui lui tombaient sur la nuque, Fadel était un gentil garçon, aux manières aimables et très ouvert, qui jouissait de la sympathie de tous les habitants du quartier. Comme l’écrasante majorité des jeunes de Pikine il était au chômage, bien qu’il eût été à l’Université où il avait décroché une maîtrise d’Anglais. Il vivotait donc et gagnait tant bien que mal un peu d’argent en vendant des tableaux de peinture qu’il exposait dans les hôtels et auberges de Ndar.

Malgré tout, sa joie de vivre restait intacte grâce à l’amour de Coumba qui en entretenait la flamme comme une vestale des temps modernes. Pour le jeune artiste de Pikine, il était hors de question de laisser détruire ce bel édifice de sentiments que Coumba et lui avaient bâti avec tant de passion ! Mais pour qui se prenait-il et que croyait-il ce nain affreux ? Qu’il suffisait d’avoir du fric pour mettre le monde à ses pieds ? Cette fois-ci il allait apprendre à ses dépens que ce n’est pas l’argent qui fait le bonheur et lui, Fadel Barry, avait sa petite idée derrière la tête sur la manière de le lui faire comprendre ! Après avoir rapidement réfléchi, le jeune homme mit au point un stratagème qui lui permettrait d’arriver à ses fins. Grâce à son plan infaillible, il arracherait sa fiancée des griffes de Ndiaga Niaaw et infligerait à ce dernier l’humiliation de sa vie. Coumba et lui allaient lui donner une leçon mémorable et lui apprendre à respecter la vie d’autrui ! Réconforté par ses pensées, Fadel avait attiré vers lui la jeune fille alanguie et l’avait serré très fort dans ses bras en susurrant de douces paroles à son oreille pour la consoler. Puis, tout à coup et contre toute attente, il avait prononcé ces paroles incroyables :
« Ecoute, Coumba, tu vas épouser Ndiaga Niaaw… »
Ces mots sonnèrent comme une gifle aux oreilles de Coumba qui resta bouche-bée (à suivre)