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Protocole à la Cour royale de Nder: Audience avec l'Abbé BOILAT.

Vendredi 19 Septembre 2014

Beaucoup de jeunes sénégalais ne s’imaginent pas la dignité et la pompe qui existaient au niveau des cours des anciens royaumes sénégambiens. C'est le lieu ici de les éclairer grâce à la narration faite par l’Abbé David Boilat sur le protocole a la cour de Nder
Ce texte pourrait figurer sur les murs de nos ambassades et des palais de la République


Protocole à la Cour royale de Nder: Audience avec l'Abbé BOILAT.
Les rois sont partout difficiles à aborder. Pour ceux du Sénégal deux conditions sont indispensables : des cadeaux et de la patience jusqu’à ce qu’il plaise à Leurs Majestés de se rendre visibles. Désireux de voir la Reine et son mari et d’augmenter mon album de leurs portraits, je profitai d’une circonstance favorable.

Monsieur Bourneuf (Charles Picard), prince du sang royal, avait une grâce à demander à sa tante la reine Ndété-Yalla. Je me décidai à l’accompagner avec Monsieur Jérôme Pellegrin, habitant notable de Saint-Louis, connu à la cour pour ses rapports commerciaux .Ce fut ce dernier lui-même qui nous reçut à bord de sa péniche pour faire ce charmant voyage de Saint-Louis au lac du Panier- Foule(ancienne dénomination du Lac de Guiers).

En arrivant à Richard- Toll, nous envoyâmes par terre un courrier pour prévenir la reine qu’un grand Thierno ( prêtre) chrétien venait la visiter : elle fut donc avertie trois jours d’avance. Aussitôt que la reine aperçut notre péniche approcher de la capitale, elle envoya des chevaux sur le rivage pour venir nous chercher. Il nous fallut deux heures de marche dans des sentiers étroits au travers des champs de mil. Nous nous présentâmes à deux heures de l’après-midi dans les cours du palais, où l’on nous fit attendre jusqu’à quatre heures, en plein soleil. On ouvrit ensuite une porte pour passer à une quatrième cour, au fonds de laquelle se trouvaient rassemblés, dans une vaste case construite en terre glaise, le Maarosso et une vingtaine de princes. Les avenues de ce palais étaient gardées par plusieurs thiédos ou soldats armés de fusils et de poignards.

Nous attendîmes là jusqu’à six heures du soir, répondant aux questions du Maarosso sur la France son gouvernement, ses forces militaires, son commerce, etc., etc. A six heures un thiédo vint annoncer que la reine était visible. Aussitôt, l’ordre fut donné : trente thiédos nous suivirent , marchant sur deux rangs avec le Maarosso et les autres princes. Nous traversâmes une grande cour pour passer dans une dernière plus grande encore, la Reine était assise au fond dans la tenue que l’on voit sur ce dessin, entourée de 500 dames de cour, assises sur des nattes. Les hommes prirent place du coté opposé, ainsi que les thiédos, qui posèrent leurs fusils à terre et s’accroupirent à la mode des tailleurs .

Nous nous présentâmes devant sa Majesté, qui nous reçut gracieusement en parlant à demi- voix. Après une conversation toute d’étiquette, je lui demandai la permission de visiter la ville et d’en tirer la vue avant la nuit. Elle le permit volontiers, et nous invita à déjeuner pour le lendemain à dix heures. Ce fut après ce déjeuner et pendant la conversation que je fis ces, deux dessins sans en prévenir Leurs Majestés. J’étais sur le point de terminer mon travail quand le Maarosso s’en aperçut, et craignant que ces dessins ne portassent malheur à la famille royale, il me fit fermer mon album, en me faisant promettre de ne plus continuer. Je promis tout ce qu’il voulait, mes croquis étaient suffisamment ressemblants : c’est tout ce que je désirais.

Nous lui remîmes nos cadeaux et, en faisant nos adieux, je leur dis qu’ils apprendraient un jour que leurs portraits sont imprimés en France

Walo Nder Septembre 1850 Abbé David Boilat

Nb : Maarosso : Gouverneur de la Province de Rosso

Monsieur Charles Picard Bourneuf avait pour mère "tégue", Rella Ndickou une cousine de la Reine NdatéYalla Mbodj

David Boilat est un métis né au Sénégal en 1814, pendant l’occupation anglaise de Saint-Louis. Il devient très tôt orphelin de son père, un officier français de la marine, et de sa mère, une mulâtresse de Saint-Louis. A treize ans, il fait partie d’un groupe de jeunes Sénégalais envoyés en France par la mère Anne-Marie Javouhey, afin d’y poursuivre leurs études. En 1840, il devient le premier prêtre sénégalais et retourne au Sénégal en 1843 où, à la demande du Gouverneur Bouët-Willaumez, il prend la direction de l’Enseignement.

Considéré comme un précurseur de la littérature sénégalaise, il publie en 1853 un important ouvrage intitulé Esquisses sénégalaises. Les récits qui accompagnent ces planches, qui sont également de l’abbé, leur donnent un éclairage particulier et une réelle authenticité. Il est également l’auteur d’une grammaire wolof. David Boilat retourne en France en 1852, où il termine sa vie en 1901.


Amadou Bakhaw DIAW


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