Connectez-vous

Reportage : Leybar Boye, un village en pleine expansion.

L'histoire de Leybar est intéressante. Selon une première version, Leybar viendrait de Lébér, un terme ouolof qui signifie en français "hippopotame". Une deuxième version voudrait qu'on retienne l'histoire du colon qui avait demandé à un habitant de cette localité de lui donner une idée précise de l'origine et de la nature d'un reptile qui y avait élu domicile. Ce dernier lui répondit en ouolof, "Li-Bâr-La" qui signifie, "Ce reptile est un varan". D'autres versions sont servies aux visiteurs.
Ce village de la communauté rurale de Gandon, qui existe avant Saint-Louis, est aujourd'hui fortement convoité par des cadres supérieurs de l'administration, des ingénieurs, médecins, informaticiens, enseignants, etc, qui mettent tout en oeuvre pour y trouver des parcelles de terrain à usage d'habitation. Car, il fait bon vivre dans cette localité où on ne vit pas sous la hantise des inondations, où on note un pourcentage de réussite de 100% à l'entrée en 6ème et au Cfee, où on peut humer l'air frais de la campagne...etc

Mercredi 6 Février 2013

Reportage : Leybar Boye, un village en pleine expansion.
L'ombre vespérale commence à se répandre dans cet endroit idyllique et paradisiaque. Une journée glaciale s'achève à Leybar Boye. Ici, la nature déploie toute son exubérance, son charme.

Il fait 16 heures 30. Le ciel pâlit imperceptiblement, faisant disparaître progressivement de notre vue la masse confuse des collines de Gandon, du Gandiolais et du Toubé. Nous empruntons à partir de Gandon, une piste de 700 mètres pour rallier Leybar où il est prévu à 20 heures, une séance de projection d'un film sur l'éveil, la santé et la protection des enfants, organisée par Plan/Sénégal.

 Dans cet écrin de verdure, rude et douillet à la fois, la végétation est verdoyante, luxuriante. Sur la piste, le gravillon crisse sous nos semelles, crépite sous les pneus des véhicules clando et autres taxis urbains qui font la navette entre ce village et Saint-Louis, moyennant 1000 F à l'aller (à partir du centre-ville) et 200F au retour.

A l'entrée du village, le sable fin est balayé par un souffle d'air dérobant. Nous sommes chaleureusement accueilli par un jeune homme rondouillard, âgé d'une trentaine d'années. Cet ouvrier agricole est d'une énergie débordante. D'un geste emphatique, il nous salue avec des mains déformées par des travaux champêtres longtemps effectués dans les champs d'oignon du Gandiolais. Des mains larges
et rugueuses comme celles des terrassiers, crevassées par les hilaires, qui nous tiennent en respect en nous faisant tituber.

Son problème est simple à comprendre. Il dispose d'un terrain à usage d'habitation aux abords du village, qu'il ne peut pas encore mettre en valeur.

"Je n'ai pas encore construit ma maison car je sais que je serais confronté à d'énormes difficultés pour avoir de l'eau potable et de l'électricité", a-t-il précisé.

Je suis originaire de Pikine Diaminar, a-t-il ajouté, "je tiens vaille que vaille à quitter ce quartier qui est inondé chaque année par les eaux de pluies et une forte crue du fleuve, tous les membres de ma famille ont décidé de me rejoindre à Leybar Boye où je suis actuellement hébergé par un ami en attendant d'être en mesure de construire ma propre maison. Dans ce village, non seulement, on respire l'air pur de la campagne, mais,  on peut bénéficier d'un espace vital où on peut bien éduquer les enfants".

Notre interlocuteur nous met en rapport avec un fonctionnaire de l'Etat qui sera bientôt admis à faire valoir ses droits à la retraite. Ce sexagénaire, qui passe le plus clair de son temps à Leybar, est tout ridé sous un chapeau de paille. Il exhibe un visage de paysan, tanné par les vents impétueux et le soleil ardent qui illumine souvent les vieilles chaumières de ce village et autres fragments de cette nature douce et joviale qui continue d'impressionner et de crucifier les visiteurs. Sa mine grave et renfrognée est creusée par un dur labeur dans les services de l'Etat. Burinée, rongée et ravinée par la fatigue, le stress des grandes villes, le calvaire, la galère et la grande corvée pour joindre les deux bouts, payer un loyer de 80.000 F dans le faubourg de Sor, subvenir correctement aux besoins de sa progéniture, rembourser des crédits bancaires, etc.

"Je prie Dieu, Le tout Puissant, pour déménager vers Leybar avant de prendre ma retraite. Moi aussi, je ne peux pas encore habiter dans ce village car, on m'a fait comprendre que le projet d'extension des réseaux électrique et d'eau potable, n'est pas encore réalisé. On étouffe à Saint-Louis où le coût de la vie augmente de plus en plus. J'envisage de faire de l'aviculture à Leybar. Mes enfants pourraient exploiter à quelques encablures de ma maison, des terres cultivables".

Il fait 17 heures 30. La ronde des aigrettes garzettes et des dendrocygnes veufs, nous rappelle que nous ne sommes pas loin du parc de la Langue de Barbarie. D'un vol ample et majestueux, ces oiseaux migrateurs explorent cette zone comprise entre le Oualo et le Gandiolais. Nous prenons encore le temps de musarder et de zigzaguer de porte en porte pour trouver un autre interlocuteur dans ce patelin où on mène une vie cloîtrée. Au fure et à mesure que nous passons en revue ces constructions futuristes, intercalées par des habitations sommaires, nous sentons notre coeur battre plus allégrement.

Une sensation mystérieuse qui nous envahit lorsque nous admirons la beauté de ce paysage mythique et atypique, où de paisibles concitoyens donnent l'impression d'ignorer la haine, la rancoeur, le mépris, l'ostentation, le cynisme, la cruauté, l'ingratitude, etc. Humbles et modestes, ces gens ne savent qu'aimer, accueillir, congratuler. Ils savent aussi endurer et se taire. Prompts à rendre service, à offrir aux visiteurs une pastèque volumineuse, des mets riches et variés et autres plats somptueux.

On ne les entend jamais se plaindre. Leur plaisir, c'est cultiver la terre, rechercher des carpes au fond du fleuve, mener d'autres activités professionnelles à Saint-Louis.

A 18 heures 30, nous rencontrons enfin Mamadou Boye, conseiller rural à Gandon et représentant du chef du village de Leybar où il est devenu l'Imam Ratib.
Moustapha Boye est le chef du village, a-t-il précisé, "c'est le frère de mon père, je le représente aujourd'hui à la cérémonie de Plan/Sénégal".

Selon lui, plus de 800 parcelles à usage d'habitation  situées autour du village, ont été déjà attribuées aux demandeurs. Les demandes de terrain viennent de tous les coins du pays et même de l'étranger. Tout le monde veut venir vivre à Leybar, qui se développe à un rythme fulgurant. Nous sommes envahis par des hauts cadres de l'administration, des ingénieurs, des médecins, des informaticiens, des travailleurs issus de toutes les catégories socioprofessionnelles. En étroite collaboration avec ces nouveaux résidents, nous nous évertuons à développer ce village. Le seul problème qui retarde notre envol, est relatif aux difficultés auxquelles nous sommes actuellement confrontés pour mettre en oeuvre cet important projet d'extension des réseaux électrique et d'eau potable.
Il est 19 heures. Le temps qui nous est imparti pour découvrir cet havre de paix où toutes les conditions sont réunies pour taquiner la muse, s'en va à vau-l'eau.

Il commence à faire nuit. Les cris stridents des oiseaux migrateurs, s'enchevêtrent avec des aigus tranchants, des modulations lentes. Les élèves s'activent dans l'enceinte de l'école primaire pour préparer l'accueil de la délégation de Plan/Sénégal conduite par Mohammed Gaye.


                     Reportage de Mbagnick Kharachi Diagne