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Verdict de l'affaire Karim Wade : 6 ans ferme, 138 milliards d'amende, chronique d'une condamnation annoncée

Lundi 23 Mars 2015

Deux années après le déclenchement des poursuites contre Karim Wade et Cie, la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) a rendu son verdict ce lundi 23 mars 2015. La sentence ne surprend guère. Karim Wade a été déclaré coupable et condamné à une peine de 6 ans ferme, plus une amende de 130 milliards de FCFA. Le substitut du procureur, Antoine Diome, avait d'ailleurs annoncé la couleur : “il n’y a pas de possibilité que Karim échappe à une condamnation». Chronique d'une condamnation annoncée.


 L'affaire démarre le 02 août 2012, date à laquelle le procureur spécial, Alioune Ndao, interdit la sortie du territoire national à 25 personnes ciblées pour enrichissement illicite. Les conseils de Karim Wade déposent un recours à la Cour de justice de la Cedeao qui, dans un arrêt rendu le 22 février 2013, a estimé que l'interdiction de sortie du territoire nationale «n’avait pas de base légale» et que le procureur spécial violait la présomption d’innocence.

Le 08 novembre 2012, lors d'une conférence de presse, le procureur spécial, Alioune Ndao, cite des dignitaires libéraux, comme Karim Wade, Oumar Sarr, Abdoulaye Baldé, Samuel Sarr, Madické Niang et Ousmane Ngom, comme étant visés par

Le 14 novembre 2012, Karim Wade rallie Dakar à bord d’un vol d’Air France.  Convoqué par les enquêteurs, il se rendra le lendemain à la Section de  recherches de la Gendarmerie de Colobane.

Ce jeudi 15 novembre 2012 est donc le point de départ de l’une des affaires judiciaires les plus médiatisées de l’histoire du Sénégal. Cette phase, dite des auditions, ne s’intéressera pas qu’au fils de Wade, puisque Bibo Bourgi, Pape Mamadou Pouye, Mbaye Ndiaye..., défileront devant les enquêteurs durant plusieurs mois.

 
Karim : «Je sais que j’irai en prison»

 

 
Durant ces longues auditions, l’affaire du jet privé de Karim Wade, les sociétés écrans qu'il aurait ouvert, et les comptes offshores qu'il aurait aux îles caïman, aux îles vierges Canaries et à Monaco, étaient au cœur des débats. L’Etat du Sénégal portera même plainte à Paris contre Karim Wade en novembre 2012.

En décembre 2012, après plusieurs auditions et confrontations, l’enquête préliminaire est bouclée. Karim sait que son sort est scellé et le dit clairement au Procureur spécial de l'époque, Alioune Ndao : «De toute façon j’ai préparé mes valises, car je sais que j’irai en prison».

 

 
L'ancien ministre sommé de justifier l'origine licite de 693 milliards

 

 
Le 15 mars 2013, Karim Wade est mis en demeure de justifier l'origine licite de ses avoirs estimés à 693 milliards de francs Cfa, dans un délai de 30 jours, conformément à la loi sur la Crei. Il travaille sur ses réponses avec ses avocats et fini par déposer ses réponses à la fin du délai imparti.

Le lundi 15 avril 2013, quelques heures après avoir déposé sa réponse à la mise en demeure qui lui a été servie, Karim est arrêté et gardé à vue à la Section de recherches de la gendarmerie de Colobane. Le lendemain, le procureur spécial, Alioune Ndao, flanqué de son substitut, Antoine Diome, fait face à la presse, et révèle avoir découvert «une véritable ingénierie financière frauduleuse», ayant entraîné la garde-à-vue de Karim Wade et de certains de ses présumés complices. Il révèle que tout reposait «sur un système avec deux déclinaisons de prête-noms».

 

 
Le fils de l'ex-Président et ses présumés complices placés sous mandat de dépôt

 

 
Le Mercredi 17 avril 2013, Karim Wade et ses co prévenus seront inculpés d'enrichissement illicite et complicité d'enrichissement illicite avant d'être placés sous mandat de dépôt à la Maison d'arrêt de Rebeuss (Mar). Six mois plus tard, Karim sera convoqué à nouveau à la Crei et reçoit une deuxième mise en demeure le 17 octobre 2013.

Le 18 avril 2014, le patrimoine de Karim Wade a été drastiquement revu à la baisse par la Commission d’instruction près la Cour de répression de l’enrichissement illicite. Ce qui n’a pas manqué de susciter la surprise. De près de 700 milliards, il a été finalement ramené à 117 milliards de  Cfa.

 

Ouverture du procès

 

 
Jeudi 31 juillet 2014, le procès de Karim Wade et Cie démarre. La première journée fut ponctuée de suspensions de séance comme lors de l’incident créé par Moïse Rampino. Militant de la cause de Karim Wade,  il avait, en plein audience, traité les magistrats de corrompus. Pour cette “outrecuidance”, il a écopé de 2 ans ferme. Les journées qui suivirent furent celles de la bataille des procédures. Mais, le 4 aout, la cour rejette les exceptions de nullité évoquées par les avocats de Karim.

 

 

Karim : «On m’a dit que vous me condamnerez à 5 ans ferme»

 

Le 1 septembre 2014, Karim Wade fête ses 46 ans à la prison de Rebeuss. Deux jours plus tard, il déclare au juge en plein audience : «On m’a dit que vous donnerez le verdict le 15 septembre et vous me condamnerez à 5 ans ferme». Les juges n'en reviennent pas.

Le mercredi 12 novembre 2014, coup de théâtre. Alioune Ndao, le procureur spécial de la Crei, est limogé en pleine audience.  L'Union des magistrats, très remontée, trouve «le procédé très grave et inélégant». Le jeudi 22 janvier 2015, l’assesseur Yaya Abou Dia, démissionne après une altercation avec le président de la Crei, Henry Grégoire Diop.

Les avocats de Karim boudent l'audience

Le mardi 20 janvier 2015, Karim adopte une nouvelle stratégie : le mutisme. Ses avocats, dans un communiqué, informent  l’opinion que «suite aux brutalités dont il a été victime, et face à la violation continue de ses droits, Monsieur Karim Wade a décidé de ne pas comparaître devant la Crei qu’il considère comme une juridiction politique. Il refuse donc de participer à une parodie de justice et à un complot politico judiciaire». Karim fut brutalisé par un garde pénitentiaire alors que son avocat fut expulsé de la salle d’audience. Ses conseils décident ensuite de boycotter définitivement le procès.

Me El Hadj Diouf, un des avocats de l’Etat, déclare alors que «Karim Wade a créé les propres conditions de sa condamnation».

7 ans ferme et 250 milliards d'amende requis

 

 

Le 11 février 2015, débutent les plaidoiries. Me Moussa Félix Sow, un des avocats de l’Etat, a demandé, au terme du procès, au nom de l’Etat du Sénégal 200 milliards de  Cfa de dommages et intérêts. Plaidoiries au sortir desquelles, Me Clédor Ciré Ly, avocat de Karim, a déclaré: «Je n’ai entendu que des attaques, des invectives».

Le procureur spécial, Cheikh Tidiane Mara, qui a remplacé Alioune Ndao au parquet général de la Cour de répression de l'enrichissement illicite, requiert pour sa part 7 ans de prison ferme, une amende de 250 milliards contre Karim Wade, la perte des droits civiques de Karim, entre autres.

 

 
Procureur Diom : «Pas de possibilité que Karim échappe à une condamnation»

Le 17 février 2015, le procureur Antoine Diome, déclare : «Rien que les biens déclarés au nom de Karim Wade sont largement suffisants pour le déclarer coupable du délit d’enrichissement illicite. Il n’y a absolument pas de possibilité que Karim Wade échappe à une condamnation», tranche le procureur Diome. «En termes d’éléments de preuves, nous avons même l’embarras du choix», renchérit-t-il.

 

 
Me Wade: «Je n'accepterai pas qu'on condamne Karim»

Malgré tout, Abdoulaye Wade, l'ancien président de la République et père de Karim Wade, soutient qu'il n'est pas question que son fils soit condamné. “Ils n'ont qu'à faire ce qu'ils veulent, mais je n'accepterai pas qu'on condamne Karim”, soutient-il. Ne s'arrêtant pas en bon chemin, il active son parti qui finit par choisir Karim Wade comme étant le candidat du Pds à la présidentielle prochaine.

Peine perdue. Ce lundi 23 mars 2015, Karim Wade a finalement été déclaré coupable d'enrichissement illicite et condamné à six (6) ans ferme et une amende de 130 milliards.