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​Opinion - NDOUMBÉLANE - Par Ousmane DIBA

Mercredi 15 Février 2023

​Opinion - NDOUMBÉLANE - Par Ousmane DIBA
Il devient de plus en plus évident aujourd’hui, pour tous les observateurs objectifs de la chose politique, qu’une dictature rampante est en train de faire tranquillement son chemin à Ndoumbélane. Elle se traduit par une mainmise flagrante de l’exécutif sur le judiciaire ainsi que les nombreuses arrestations arbitraires (sur commande ?) de militants d’une certaine opposition dite significative. Vous pouvez beau être accusé d’être catastrophiste pour l’avoir dit, ce n’est pas une simple vue de l’esprit mais bien plutôt une réalité. Et la situation est d’autant plus préoccupante que cette dictature se déroule sur fond de misère social d’un peuple écrasé par une famine qui rappelle les dures conditions sociales des mineurs dans Germinal de Zola.

Ainsi, les goorgolous, confrontés à des problèmes de survie des plus élémentaires sous la montée vertigineuse du prix des denrées de première nécessité ont fini par se résoudre à ramener les trois repas quotidiens à deux et même à un seul pour certains. L’époque où on pouvait satisfaire sans grande difficulté les besoins primaires de la pyramide Maslow apparait désormais comme un vague souvenir d’un passé lointain. La gabégie, la corruption et le détournement des deniers publics finissent par s’imposer comme seul mode de gestion du pouvoir et des affaires publics, exacerbant ainsi le courroux d’un peuple qui se sent de plus en plus laissé à lui-même. 

Mais le plus grave encore dans tout cela est qu’il n’y a plus de cadre d’expression légale pour extérioriser pacifiquement tout ce ressentiment social. La répression est devenue quasi obsessionnelle pour ce régime agonisant qui n’a plus que la violence comme unique solution aux nombreuses difficultés que traversent les populations, paupérisées par les multiples choix économiques qui dénotent un manque notoire de vision politique et économique à long terme, capable de sortir ce pays, naufragé dans les eaux boueuses de la prédation, du calvaire qu’il traverse depuis les indépendances.

Et pour ne rien arranger, depuis quelque temps, la liberté d’expression a pris un sérieux coup avec la mise en place d’une certaine dictature de la pensée unique qui n’a rien à envier à la Russie bolchevique ou à l’Allemagne nazie. La mise sous silence systématique des groupes de presse jugés trop subversifs et les incarcérations de journalistes et autres penseurs critiques sont devenus tellement banales que plus personne ne semble s’en offusquer outre mesure. Dès lors, nous assistons à la prise en otage de l’opinion à qui on a imposé une certaine classe d’idéologues chargée de théoriser et de valider une idéologie de la soumission, en la rendant acceptable, par des tours de prestidigitations intellectuelles et autres sophismes malvenus.

Comme c’est le propre de tout régime dictatorial que d’inventer de nouvelles définitions aux concepts les plus élémentaires pour mieux contrôler les représentations sociales, les mots les plus banals du champ lexical juridique apparaissent désormais comme trop compliqués pour les esprits simples, nécessitant ainsi l’intervention de spécialistes pour leur donner un contenu approprié. La novlangue de Big Brother dans 1984 de Georges Orwell écrit en 1949, répondait au même principe, celui de dénaturer la réalité.

Ainsi, dans cet univers social artificiel et fantoche, il n’y a plus de place pour les riches nuances de la pensée et au pluralisme intellectuel. Plus de compromis possible. Le monde apparait désormais en noir et blanc, clair, sec et net comme un couperet de guillotine. D’un côté, les bien-pensants, les pertinents, les détenteurs de la vérité ; et de l’autre, les mal-pensants, les impertinents et les menteurs, c’est-à-dire les ennemis des valeurs qui incarnent le principe du mal. Cette déraison, qui prend ici les formes d’une négation de l’altérité, si on n’y prend pas garde, risque alors de déboucher inévitablement sur une confrontation violente dans l’espace social.

Ousmane DIBA
Professeur de philosophie au lycée El Hadji Abdou Hamid Kane de Kaolack


Ps : toute ressemblance avec un quelconque pays existant ou ayant existé n’est que pure coincidence


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