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HOMMAGE D’UN ELEVE A SON MAITRE: Al Mansour, le météore en 7 dimensions ! Par Fernand Nino MENDY

Jeudi 3 Mars 2016

Aujourd’hui, l’occasion m’est donnée d’exprimer le mot qui a toujours traversé mon esprit quand je me rappelle la matinée de l’année 2005 je me réveille et un ami m’annonce le rappel à Dieu de mon ami, mon grand frère, mon professeur, El Hadj Mansour NIANG : le météore !




La rapidité et la vitesse avec laquelle cet homme a vécu et passé sa vie devant les hommes ne renvoient à mon esprit qu’une image de météore !

« Corps céleste qui traverse l’atmosphère en produisant un phénomène lumineux ». Telle est la définition du météore. C’est le seul mot qui me satisfait si je dois qualifier le passage du professeur Mansour NIANG sur terre. Avec le recul, il était bien possible pour les hommes attentifs d’entrevoir que Mansour donnait l’impression de savoir ce fait sur sa vie. Mansour a vécu peu et pourtant, il a beaucoup fait. Ce paradoxe est assez révélateur sur l’homme !

Aussi incroyable que cela puisse paraître, je ne pouvais pas croire que cet ami était parti. C’est le jour de la cérémonie de son hommage posthume à l’université Gaston Berger Saint-Louis, après avoir projeté et suivi le film de témoignages sur lui que je me suis rendu compte qu’effectivement le professeur Mansour NIANG n’était plus. Je me rappelle encore mes sanglots qui m’ont obligé à quitter le présidium puis l’amphithéâtre Madické DIOP!

Al Mansour, le génie !

Quelles que soient les circonstances dans lesquelles on a rencontré ou connu Mansour, on ne peut manquer d’être frappé d’admiration par son intelligence. Mansour était un homme intelligent et intellectuellement brillant. Il ne voulait pas le reconnaitre, il préférait plutôt parler des autres. Au delà des lectures et de la réflexion personnelle, personne ne peut douter de l’intelligence dont était doté ce génie. Ne croyant qu’au travail, il faisait souvent référence à l’autre illustre Sénégalais, le professeur Cheikh Anta DIOP qui écrivait déjà que le génie est une longue sueur.


Donc, selon Mansour, le génie n’est rien d’autre que le fruit du travail et sur ce point également, il citait toujours Cheikh Anta DIOP : « ce que l’on appelle l’entêtement chez l’âne, n’est rien d’autre que la persévérance chez l’homme ». L’assistant toujours dans ses rencontres avec les étudiants et les conférences, cette phrase, je l’ai entendue de lui, plusieurs fois. Ses étudiants l’ont mémorisée. Un jour, il m’a confié dans son bureau qu’il lisait chaque jours cinquante (50) pages d’un livre quelconque avant d’allumer son téléphone mobile ou de sortir de chez lui le matin. Mansour  était un apôtre du culte du travail et de l’excellence !

Al Mansour, le patriote !

Pour quelqu’un qui a connu Mansour, il n’est pas possible de constater son amour du Sénégal, des Sénégalais, de son Peuple tout simplement. Mansour aimait son pays et son Peuple. Dans ses poèmes, il s’attaquait d’une manière acerbe aux vices des Sénégalais. Il nourrissait une sorte de haine pour les tares des Sénégalais. Il s’adressait souvent aux jeunes. Pour lui, il n’était pas question de laisser la jeunesse à elle-même. Ayant vécu une jeunesse studieuse baignée aussi bien dans les écritures saintes et les connaissances scientifiques, il a compris que c’est à la jeunesse que l’on forme un patriote, un citoyen. Il croyait fondamentalement que si la jeunesse sénégalaise était bien éduquée, notre pays serait le meilleur. Selon lui, le déclin de notre pays viendrait de la débridation des mœurs  dans la vie publique. Il aimait ce pays mais il n’a jamais souhaité faire la politique de manière publique tellement la scène politique sénégalaise était loin de son idéal politique.

Al Mansour, l’intellectuel engagé !

Homme de science, personne ne peut douter de l’engagement de Mansour. Il était conscient, je dirais qu’il avait une haute conscience de sa responsabilité dans l’avenir de la jeunesse et du Sénégal, de l’Afrique et bien même du monde. Mansour voulait marquer l’humanité dans le bon sens. Il a toujours manifesté le souhait de jouer son rôle dans la marche de l’humanité. Il était un enseignant, il devait bien enseigner comme le disait le juge Kéba MBAYE. En exerçant son métier, il formait des citoyens, des hommes conscients de leur responsabilité et qui s’engagent à relever les défis auxquels fera face leur génération. C’est la raison pour laquelle, dans son recueil de poèmes posthume La quarantaine, il s’adresse constamment aux jeunes. Selon lui, la science doit être au service de l’homme, au service de l’humain tout court !

Al Mansour, le croyant !

Je découvrais, un jour, que Mansour était véritablement un croyant. Ce que je vais écrire est important. Lisez. J’ai travaillé et assisté Mansour pendant un bon moment mais je n’avais jamais su qu’il s’adonnait autant à l’étude du Coran qu’à la connaissance de la littérature. C’est un jour en préparant une conférence sur la femme que l’on échange sur la place de la Femme dans le Coran et dans la Bible. C’est ce jour précis que j’ai été étonné par sa maitrise du Coran. Et c’est bien plus tard que j’appends la place qu’il accorde au Dahira, à l’enseignement du Coran et à Serigne El Hadj Malick SY. Il est important de témoigner que Mansour observait souvent le jeun. Je ne sais pas s’il avait consacré des jours pour cela mais plusieurs fois, c’est en fin de journée que je le voyais manger et je comprenais qu’il avait jeuné. J’ai compris plus tard que le jeun lui permettait de se concentrait dans ses travaux. Il  travaillait tout le temps. Je me demandais souvent s’il se reposait.

Je ne peux pas me permettre de ne pas partager sa vision du monde en relation avec sa foi. Mansour était un ascète. Il n’attachait pas de l’attention, ni ne s’attachait aux biens matériels de ce bas monde. Ayant passé avec lui parfois des journées entières, il ne parlait jamais d’argent. Il ne s’en préoccupait même pas. Il changeait souvent peu ses tenues, il les maintenait juste propres pour vaquer à ses occupations d’enseignant. Discret, il créait ses propres chemins pour se rendre à certains lieux qu’il fréquentait régulièrement. Il aimait bien marcher, se promener surtout en fin de journée. Il aimait bien mettre ses mains sur le dos en baissant la tête. Il pensait. Il réfléchissait toujours. 

Ceci m’amène à écrire que Mansour donnait l’impression de venir d’un autre monde dont il avait la nostalgie. Il aimait un autre monde qui n’était pas ce bas monde. Il a intitulé l’un de ses poèmes : « les murmures du poète exilé ». Mansour était un croyant accompli. Malgré son génie intellectuel, j’avoue que cette dimension de l’homme m’a beaucoup marqué. C’est la raison pour laquelle, j’emploie le diminutif Al Mansour car il est plein de sens et il souriait souvent quand son grand ami, le professeur Cheikh Tidjane FALL l’appelait ainsi. J’avoue qu’à chaque fois qu’il l’appelait ainsi, il souriait. Et dans leur rapport d’amis, c’est ainsi que le professeur FALL l’appelait toujours.

Al Mansour, le pédagogue !

Il n’y pas un élève ou un étudiant qui ne reconnait pas les qualités de pédagogue de Mansour. Il tirait ses qualités de pédagogue de son humanisme, de son amour du savoir, de la connaissance de l’homme, de son amour de la culture greco-romaine. Le concept de la pédagogie de la réussite semble nouveau mais, ceux que Mansour a enseignés, peuvent  affirmer qu’il l’est des précurseurs par la pratique. Je dirais, pour Mansour, si l’homme est perfectible, l’élève est aussi perfectible. Il pratiquait le culte de l’excellence. Les étudiants, dont le niveau était le plus faible, parvenaient à exceller grâce à la compréhension des cours du pédagogue. Mansour croyait fondamentalement que le génie n’est pas inné mais qu’il s’acquiert par la persévérance. Ma génération regrette d’avoir perdu un professeur mais surtout un pédagogue, un véritable enseignant. 

Mansour se donnait comme objectif de réveiller la passion des études et l’amour du savoir. Et dans cette quête du savoir, il faut accepter l’humilité, la douleur et les sacrifices qui amènent au plus haut niveau de la connaissance. Il enseignait à partir d’une philosophie née de la volonté non pas de transmettre des connaissances mais d’une passion, d’un amour du savoir. Ma génération a vu Mansour réveiller un génie en chacun. Mansour était un maître et nous étions ses disciples. C’est la raison pour laquelle, après sa disparition, nous avons jugé nécessaire de rassembler ses textes pour publier à titre posthume son recueil intitulait : La quarantaine.

Cette démarche nous a été inspirée par lui-même, de ses cours de latin et de l’histoire des penseurs de cette époque. C’est ainsi que les disciples ont diffusé la pensée de leur maître dans le monde.

Al Mansour,  l’universitaire !

Mansour NIANG était un universitaire dans le vrai sens du terme. Il était dans la quête d’une vérité humaine. Comprenons l’usage de ce mot dans le sens de la quête de la connaissance et de compréhension du monde fondée sur une démarche aussi rationnelle que possible. La raison est, selon Mansour, un don de Dieu mais aussi une arme de destruction massive. Reprenant le penseur français, Mansour NIANG était convaincu que la science sans conscience n’est que ruine de l’âme.

Mansour considérait son métier d’enseignant-chercheur comme une mission avec des résultats qu’il amenait ses collègues à constater. Il s’agit des publications scientifiques et la formation de hauts cadres capables de penser les problèmes les plus sérieux auxquels l’humanité serait confrontée. Mansour ne formait pas des étudiants mais des hommes, et pour lui, la recherche doit contribuer au bonheur de l’homme. C’était là, sa mission d’Enseignant-Chercheur.
 
Mansour, le poète !

La poésie est la forme littéraire par laquelle Mansour NIANG aimait bien exprimer sa pensée. Selon ma compréhension, cela pouvait être compris d’abord par le fait qu’il était un Orateur. Il était un brillant orateur. A le suivre, on pouvait comprendre toute l’influence des penseurs grecs qu’il a subie en tant que latiniste. Il les connaissait bien et d’ailleurs ses cours de latin commençaient toujours par l’histoire de ces grands hommes.

Ensuite, il m’a semblé que la forme poétique était celle qui était la plus idoine pour exprimer sa pensée. Il parvenait par des vers à exprimer des idées profondes peut être qu’il aurait eu du mal à extérioriser ou à communiquer au public à partir des autres genres littéraires.

Je pense aussi que la forme poétique lui rappelait les chants tidjanes qui ont bercé sa vie. Je ne l’avais jamais écouté chanter à haute voix. Il murmurait juste ses chants. Dans son bureau, il y avait un petit magnétophone avec des cassettes de chants religieux. Quand il était seul, il écoutait ses chants. Il refusait de manifester sa foi en recevant des gens. Il vivait sa religion à l’université avec beaucoup de discrétion. Ce sont ses qualités humaines qui faisaient que bien des gens ont fait le lien entre sa foi et sa vie de tous les jours.

Dans ses poèmes, il a célébré l’intelligence, il a chanté les valeurs humaines. Il s’est aussi attaqué avec violence aux mauvaises pratiques des hommes en général et des Sénégalais en particulier  telles que la paresse, le bavardage, le laxisme, l’excès…

Tout le monde aura compris en lisant ces lignes sur cet homme, les raisons pour lesquelles, je considère qu’Al Mansour était un météore. Tellement son passage sur terre a été vif mais dense!
Il n’est pas possible de conclure sur cet homme, si ce n’est juste pour dire, je m’en arrête là, en attendant une autre occasion pour encore pour témoigner et révéler d’autres qualités du météore.

 Fernand Nino MENDY           
Etudiant de Mansour NIANG
UFR des Lettres et Sciences Humaines
Université Gaston Berger de Saint-Louis
 
 


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1.Posté par Yatma DIEYE le 03/03/2016 13:58 | Alerter
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Quel beau témoignage.
Et de rajouter qu'il était plus que tout cela. Pas assez de mots pour décrire ce génie, cette trempe d'homme comme il n'en existe que parcimonieusement.
Je me rappelle ses cours de latin ou de français où parfois nous sortions tables et chaises pour nous mettre à l'ombre d'un arbre pour déstructurer nos pensées et les projeter au-delà des quatre murs d'une sale.
L'enveloppe du cerveau, nous disait-il, pouvait s'étaler à l'infini et couvrir entièrement la surface terrestre. Ainsi, l'homme pouvait acquérir tous les savoirs de la terre. En sixième déjà, il nous enseignait les grands penseurs comme Publius Terentius Afer "homo su et nihil humani a me alienum esse puto" (je suis un homme et je pense que rien d'humain ne m'est étranger) et bien d'autres encore que nous redécouvrîmes plus tard avec la classe de philo.
La place du savoir pour lui, ne souffrait d'aucune concurrence. Il pouvait passer plusieurs jours d’affilé dans une bibliothèque en jeunant pour sortir le moins possible de son retrait. Ceux qui l'ont connu, ont connu un grand Homme. Je suis heureux d'en faire partie car Magister vous marque à jamais toute votre vie durant.
Puisse sont esprit se propager très largement et inspirer au-delà de ceux qui l’ont côtoyé car en voilà un qui était véritablement exceptionnel.
Salve Magister

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