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VIES DE CHIEN (25)

Mercredi 15 Février 2012


Liza aimait particulièrement s’installer à la fenêtre du studio à l’heure du « takusaanu ndar », l’heure de la promenade des élégantes Saint-louisiennes, belles et hautaines, qui s’y donnaient rendez-vous, habillées comme des princesses, dégageant de suaves et voluptueux parfums. Parés de leurs plus beaux costumes les jeunes gens se pressaient eux aussi au « takusaanu ndar » où ils rivalisaient de galanterie auprès des nymphes qui défilaient sous leurs yeux de leur démarche à la fois souple et nonchalante. Certaines, pipe en terre cuite à la bouche, portaient des colliers d’ambre et des parures en or massif et tenaient à la main un éventail en osier qu’elles agitaient avec des gestes calculés mais gracieux. C’était un spectacle extraordinaire dont Liza ne se lassait jamais. Parfois lorsque Malick se levait de sa chaise pour la rejoindre elle faisait mine de le repousser et disait en riant :
« Ah non ! Ne t’approche surtout pas de cette fenêtre mon beau militaire, sinon tu vas succomber au charme des sirènes qui passent par ici !... »

Mais ce dernier passait outre et s’approchait de son aimée qu’il enlaçait tendrement, posant ses lèvres sur son front avec délicatesse :
« Tu n’as rien à craindre ma chérie, je suis devenu aveugle depuis la première fois où je t’ai vue et il n’y pas sur terre de beauté égale à la tienne… »


L’amour de Malick et de Liza eut raison de toutes les réticences, de toutes les jalousies, de tous les obstacles et le jeune militaire musulman finit par épouser la belle aristocrate chrétienne. Ce fut l’occasion d’un nouveau « scandale », car pour l’amour de sa belle, Malick accepta de se marier à la cathédrale de Saint-Louis où il passa l’anneau nuptial au doigt de Liza qui était au comble du bonheur. Le mariage eut lieu en grande pompe et, après la cérémonie religieuse que le curé de la paroisse de Saint-Louis avait accepté de célébrer sous la pression de la hiérarchie militaire française, un grand bal fut donné dans la salle des banquets du Rognat en présence de tous les officiers et sous officiers français du bataillon. Nombreux furent ceux qui, musulmans et chrétiens, pensèrent que Malick avait apostasié pout pouvoir épouser Liza et les commentaires allèrent bon train. En fait il n’en était rien.

Il s’agissait juste d’un « arrangement » pour faciliter l’union des deux amoureux. Malick était bel et bien musulman et Liza restait solidement ancrée dans sa foi chrétienne. Après son mariage avec Malick elle continua, comme d’habitude, d’aller tous les dimanches assister à la messe en compagnie de la vieille et fidèle « tata » Marie. Mis devant le fait accompli, tonton Jacques et la mère de Liza n’eurent d’autre choix que celui d’accepter Malick comme gendre. Néanmoins, la politesse, la courtoisie, l’amabilité et l’extrême délicatesse de ce dernier mais aussi le fait qu’il fût un officier de l’armée française, finirent par les désarmer et supprimer en eux toute velléité de refus.

Tonton Jacques surtout avait été très touché par l’énorme concession de Malick qui avait accepté de bon cœur de se marier à l’église et de se faire bénir par le curé. Par ce geste il donnait la preuve que c’était un homme d’une extrême tolérance et surtout, qu’il aimait sincèrement Liza.

« Finalement ton musulman là, c’est quelqu’un de vraiment très bien hein ma petite Liza !... » disait-il souvent en plaisantant à sa nièce. (à suivre…)