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VIES DE CHIEN (66)

Mercredi 5 Décembre 2012


En effet, deux semaines plus tard, lorsqu’il avait vu en direct à la télévision le nouveau président, fraîchement élu, déclarer sans sourciller « Mes chers concitoyens, vos soucis d’argent sont terminés ! Je ferai de vous tous des hommes riches comme Crésus ! » cela lui avait fait l’effet d’une douche glacée et il avait ressenti comme une remontée de bile dans son œsophage. Écœuré, il avait appuyé d’un geste rageur sur le bouton du poste téléviseur et enfoui son visage dans ses mains sous le coup de la colère et de l’amertume.

Ce jour là mon maître prit la décision de ne plus s’intéresser à la politique et de se consacrer exclusivement à sa famille et à son travail.

Plus d’un an après « l’exil » européen d’Assane et Ousseynou, l’ambiance de la maison familiale avait notablement changé. Il y régnait à présent une sorte de calme recueilli en l’absence des jumeaux boute-en-train qui en assurait l’ambiance. A eux trois, Yacine, Salimata et mon maître faisaient autant de bruit que des moines dans une abbaye. Bien qu’il ne fût pas un dévot comme l’eût sans doute souhaité sa femme, mon maître n’en menait pas pour autant une vie dissipée et il savait se contenter des plaisirs les plus simples et les plus sains comme la lecture, les promenades et, lorsque survenait l’hivernage, période à laquelle il prenait ses congés, les virées à l’hydrobase et les bains de mer interminables.

Je suivais mon maître comme son ombre et l’accompagnais partout où il allait. Nous étions pour ainsi dire inséparables et il y avait entre lui et moi une authentique empathie. L’amour qu’il me portait paraissait étrange à ceux qui sont incapables de comprendre la profondeur de la relation qui peut exister entre un homme et un chien et me faisait parfois me remémorer ces mots de Colette qui étaient pour moi mieux qu’un viatique: « Loin de vous oublier, chiens chaleureux,
Comment me passerais-je de vous ?
Vous me faites sentir le prix que je vaux.
Un être existe donc encore pour qui je remplace tout ?
Cela est prodigieux, réconfortant. »
La secrète osmose qui peut exister entre un chien et son maître restera à jamais un mystère pour les personnes à l’esprit carré et peu sensibles à tout ce qui relève du subliminal.
Mais moi, je savais parfaitement la raison pour laquelle mon maître m’aimait si fort et tenait à moi presqu’autant qu’à la prunelle de ses yeux : j’étais le seul être au monde sur lequel il pouvait entièrement se reposer et avoir une confiance aveugle, le seul qui lui fût soumis corps et âme et d’une fidélité sans faille, le seul dont il eût pu faire tout ce qu’il voulait, le seul qui lui permettait d’exercer ce pouvoir absolu qui fait d’eux des demi-dieux et auquel aspirent au fond d’eux-mêmes tous les autres humains.

Qui d’autre qu’un chien en effet eût accepté de se coucher docilement à ses pieds, le cœur battant au rythme du sien, ses propres pensées et mes rêveries s’écoulant dans un même flux et reflux ? Qui d’autre qu’un chien, courbant humblement l’échine, eût accepté d’obéir au doigt et à l’œil à un simple appel de la voix, au moindre claquement de doigts de celui dont il a fait son seigneur, son maître ? Mais pour moi Nestor, tout cela allait bien évidemment de soi ! (à suivre…)


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1.Posté par Ancien Eleve le 06/12/2012 04:22
Par pur hasard, je suis tombe sur votre rubrique. Je prendrai le temps de lire les contributions precedentes...
Je retourne en classe Mr Camara..
Vous m`avez beacoup appris a Neuville.
Responsable de classes : 4eme et 3eme des annees 80.