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VIES DE CHIEN (70)

Mercredi 2 Janvier 2013


Sois patiente et ferme les yeux sur la faute commise par ton mari ; ne lui fais aucun reproche, ignore le royalement de manière à ce qu’il éprouve de la honte et tu verras qu’il se repentira et reviendra vers toi. Je suis sûre qu’il a agi sur un coup de tête, poussé par son orgueil de mâle et qu’il ne tardera pas à regretter son geste et à répudier cette petite intrigante… » « Tu…tu crois vraiment ça ?... » bégaya tante Alimatou. « Les voies du Seigneur sont impénétrables, ma sœur » poursuivit Yacine, sentencieuse « Dieu nous envoie parfois des épreuves pour nous tester mais aussi pour fortifier notre foi ; parfois ces épreuves sont terribles et si l’on n’y prend garde l’on risque de succomber, mais Dieu est toujours avec les patients ; alors garde ton sang-froid et les choses se passeront de la manière dont tu le souhaites… » Yacine termina en citant un verset coranique et se tut, observant tante Alimatou du coin de l’œil. Ses paroles avaient visiblement eu de l’effet sur sa belle-cousine dont l’air hagard avait disparu.

La physionomie de tante Alimatou était beaucoup moins crispée et elle observait un silence méditatif qu’elle interrompit elle-même : « Yacine, merci infiniment de m’avoir prodiguée de si bons conseils et de m’avoir ramenée à moi-même ; tes sages paroles m’ont convaincue te je me réjouis d’être venue me confier à toi car j’étais sous l’emprise de Satan et j’étais sur le point de commettre une bêtise que j’aurais regrettée le reste de ma vie ; tu as mille fois raison : la vraie solution est de garder la tête froide pour mieux faire face à cette situation… » « A la bonne heure !... » approuva Yacine soulagée, « J’étais sûre que tu reviendrais à de meilleurs sentiments et que tu ne céderais pas aux mauvais esprits qui veulent briser ton ménage ; je suis trop heureuse que tu m’aies écoutée ma sœur !... ». Confortablement étendu à plat ventre sur les carreaux frais du couloir qui jouxtait le salon, je n’avais pas perdu une seule miette de cette singulière conversation. Je ne pus m’empêcher d’admirer la grande force d’âme de Yacine qui avait réussi à contenir puis maîtriser la fureur de tante Alimatou qui, aveuglée par sa colère, eût été à ce moment là bien capable d’arroser d’huile bouillante son traître de mari comme le font nombre de femmes de ce pays dans pareilles circonstances.

Même moi qui n’aimais pas particulièrement tante Alimatou à cause de ses méchants préjugés sur les chiens, j’éprouvai ce jour-là une vague sympathie pour elle du fait qu’elle était la victime d’une flagrante injustice de la part de son mari. Tête baissée, la femme blessée dans son amour-propre avait réussi à esquisser un pâle sourire et repris la parole d’une voix où perçait la gêne : « Yacine, je m’excuse de m’être emportée et d’avoir tenu de si vilains propos tout à l’heure…J’en suis vraiment désolée. « Ce n’est pas grave ma sœur » dit Yacine avec douceur « Tu étais sous le coup de la colère et tu ne pensais pas ce que tu as dit ; je sais que tu aimes ton mari et que tu n’as jamais cru à ces absurdes histoires de caste… » « Oh Yacine, tu es si bonne ! C’est Dieu qui m’a guidée vers toi. Tu es un ange ! » reprit tante Alimatou la voix brisée par l’émotion. Elle se remit à pleurer, mais cette fois doucement. Sans dire un mot, Yacine s’approcha d’elle et, la prenant dans ses bras, essuya les larmes qui coulaient sur son visage et se mit à la bercer comme une enfant.

Témoin de cette scène touchante, je poussai sans le faire exprès un petit jappement ému. Surprises, les deux femmes se regardèrent avec étonnement et éclatèrent de rire en même temps. ( à suivre..)