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Vies de chien 18

Mardi 27 Décembre 2011

Voulant consoler sa dulcinée du ruisseau, Leputois me lâcha un instant et revint vers elle pour l’enlacer et la couvrir de ses baisers visqueux. Katy se contorsionnait comme une limace dans les bras de son vieux, faisant comme d’habitude semblant de prendre du plaisir à ses caresses. C’était tout simplement dégoûtant et ça me donnait envie de vomir. Après cette petite séance digne d’un kamasoutra des bas-fonds, Leputois se tourna de nouveau vers moi avec un air féroce qui le faisait ressembler à un diable japonais et en disait long sur ses intentions. Nullement apitoyé par mes gémissements, il me prit à bras le corps, me ficela comme un saucisson et me fourra de force dans un sac de jute ; puis il me jeta sans ménagement dans la malle arrière de sa voiture au volant de laquelle avait pris place Katy. Leputois vint s’asseoir à ses côtés et la mijaurée démarra en trombe vers une destination inconnue de moi. Pendant tout le temps que dura le trajet qui me parut interminable, je tremblai comme une feuille morte et ne cessai de m’interroger sur ce qu’il allait advenir de moi. Tenaillé par une angoisse sans nom, j’étais à la merci de ce couple diabolique et je pensai au pire. J’étais même persuadé que ma dernière heure était arrivée et que Katy allait me faire payer toutes les contrariétés que je lui avais fait subir. La petite saligaude devait à coup sûr jubiler dans son for intérieur et se dire que l’heure de savourer sa vengeance était enfin arrivée. Cette criminelle n’hésiterait pas une seconde à l’assouvir de la manière la plus cruelle !

De son côté Leputois devait m’en vouloir à cause de l’abominable forfait que j’étais supposé avoir commis en souillant sa belle moquette à laquelle il tenait tant. Je m’étais rendu coupable à ses yeux de la pire des ingratitudes, surtout après tout le bien qu’il pensait m’avoir fait en m’accueillant chez lui. Solidement ligoté et enfermé dans mon sac de jute où j’étouffais à moitié, j’entendais les deux coquins rire à gorge déployée et échanger des plaisanteries vulgaires.

Le crépuscule s’était depuis longtemps évanoui et la voiture filait à toute vitesse sur l’asphalte. Mon cœur battit la chamade et mon pelage était tout entier couvert d’une fine sueur, ce qui rendait la situation encore plus inconfortable. Katy et Leputois continuaient de plus belle leur inconvenant bavardage. Pour moi qui arrivait à peine à respirer, ce qu’ils disaient n’avaient aucune espèce d’importance et je m’efforçais d’en noyer le sens dans le flot de mes pensées au point de ne même plus les entendre. En un moment donné pourtant, je les entendis clairement prononcer le mot « fleuve » et je compris alors où ils voulaient en venir : ils avaient l’intention de me m’infliger le plus atroce des supplices : la mort par noyade. Cela serait d’autant plus douloureux que, coincé dans mon sac de jute, je ne pourrais guère bouger ni me débattre. Le coup de frein de Katy mit fin à mes macabres réflexions.

La voiture s’immobilisa et tous les deux en sortirent en sautant d’un bond sur le sol. Ce fut bien sûr Leputois qui fit le tour pour venir ouvrir la malle arrière dans laquelle s’engouffra un vent glacial. C’était la fin. Je fermai les yeux de toutes mes forces et adressai une muette prière à Anubis le dieu de tous les chiens afin que me soient ouvertes toutes grandes les portes du paradis des chiens après toutes les souffrances et injustices que j’avais subies au cours de ma courte vie. Quelques instants plus tard, toujours enfermé dans le sac de jute, je me sentis soulevé puis projeté avec violence avant… d’atterrir sur un sol sablonneux et mou.

Le choc fut si rude que je ne pus m’empêcher de pousser un gémissement de douleur. Peu après, Leputois me fit sortir avec brutalité du sac de jute et je me retrouvai au beau milieu d’une grande cour à ciel ouvert, tout maculé de sable, pendant que j’entendais cette salope de Katy s’adresser en wolof à une femme apparemment d’âge mûr si j’en jugeais au timbre de sa voix.
« Salamalékoum tata Awa, voici le chien dont je te parlais ! »

« Ah très bien ! Merci beaucoup ma fille ! Vraiment nous en avions bien besoin tes cousines et moi…Notre quartier est infesté de voleurs ces temps-ci…Makhalla, il y a trop de Gniaks et de Peuls fouta à Saint-Louis maintenant ! ».
Je venais de pénétrer dans l’antre des sorcières de Ndiolofène ! (à suivre…)