(Photos) Concert du 27 mai 2012 : Un mariage entre le jazz et la musique traditionnelle africaine

Caroline Beauchamp

Sussan Deyhim

La soirée s’est ouverte sur un message d’excuse de Samba Diop, membre de la commission programmation, par rapport à l’absence de Manuel Dibango. Sussan Deyhim a elle aussi exprimé son regret à ce sujet.


En contrepartie, la chanteuse iranienne avait réservé une petite surprise pour l’audience : ‘‘Un de mes meilleurs moments ici à St-Louis était mon moment avec les enfants à l’école. Il y a tellement à apprendre des enfants. Ce festival a une mission à côté de la musique, c’est celle d’éduquer.’’ Elle a fait monter sur scène l’espace de quelques minutes un petit groupe d’enfants pour leur faire chanter l’hymne national sénégalais.


Suite à cette première présence sur scène pour les enfants, Sussan Deyhim a entamé son programme. Elle a rendu des chansons jazzy qui puisaient essentiellement dans le répertoire iranien traditionnel. Elle a emmené avec elle une touche des mystères du Moyen-Orient avec ses musiques douces et captivantes. Élégante, elle dansait au son des instruments.


Elle possède la technique vocale des chanteuses du Moyen-Orient et s’en est servie pour employer des demi-tons, répéter des onomatopées, faire des crescendos, ou pour inspirer et expirer avec les cordes vocales, bref, pour s'amuser avec les possibilités de la voix.


Au milieu du concert, un instrument très inhabituel a fait son entrée, il s’agit du wave drum ou ‘‘love machine’’, a blagué Will Calmoni à Ndarinfo après le concert. Ce dernier, batteur de la formation, a présenté une improvisation en alternant puissants solos de batterie, et intrigantes mélodies de cet instrument électronique de percussion, qui peut produire des sons semblables à ceux de la guitare.


Le premier concert de la soirée s’est terminé sur des notes de Steevie Wonders, et le public a répondu à la prestation par une ovation debout.


En entrevue, Sussan Deyhim s’est dit contente d’être à Saint-Louis, et que son passage dans cette ville lui a permis de vivre une expérience très humaine et inspirante, notamment en rencontrant les enfants qu’elle avait fait monter sur scène au début de la prestation. Elle a d’ailleurs salué la cohabitation pacifique qui existe entre le christianisme et l’islam au Sénégal.



Jazz Roots

Jazz Roots a été accueilli par une Place Faidherbe particulièrement remplie. Le Festival de Jazz de Saint-Louis a reçu la formation en exclusivité, car pour le groupe, ce spectacle était pratiquement leur concert de sortie d’album.


La formation, composée de huit excellents musiciens, a allié sur scène sonorités africaines et occidentales. La kora d’Ablaye Cissoko, la flûte peule d’Ousmane Bâ, ainsi que les sabars de Babou Ngom et deux de ses fils côtoyaient le piano de Sophia Domancich, la contrebasse de Jean-Philippe Viret et la batterie de Simon Goubert. Ici aussi, les effets sonores étaient mis d’avant-plan. Parfois, les huit musiciens jouaient ensemble alors qu’à d’autres moments, pour favoriser certains sons ou pour modifier la masse sonore, certains s’absentaient question de ne laisser que trois ou quatre musiciens sur scène.


Avec Jazz Roots, la musique revêtait un caractère quelque peu expérimental et particulièrement imprévisible, où il fallait simplement se laisser porter et faire confiance au talent des interprètes. Rien n’était laissé au hasard, tout était bien contrôlé. La densité sonore était un paramètre avec lequel le groupe a beaucoup joué, et l’accumulation de sons répétés et de patrons joués en boucle, en plus de la superposition des instruments, pouvaient parfois mener à une impression chaos calme et contrôlé, puis suivait l’épuration, le retour vers la clarté.


Le instruments percussifs prenaient tour à tour un rôle dominant ou accompagnateur. Parfois, les sabars très rythmés se faisaient entraînants et l'auditeur assistait à des dialogues entre la batterie et ces instruments africains. À d'autres moments, lorsque jouée avec les instruments mélodiques, la batterie pouvait devenir très discrète et miser sur les sons sourds des peaux habilement frappées avec des baguettes feutrées, ou les grincements d’une cymbale grafignée.


Les musiciens de Jazz Roots avaient été réunis pour la première fois lors de l’édition de 2010 du Festival de Jazz de Saint-Louis : ‘‘C’est ici qu’on a créé ce groupe sous l’idée du président Assane Fall, c’est notre 2e présence au festival’’, a révélé Simon Goubert.



Franck Amsallem

Avec Franck Amsallem, c’est le retour aux sources du festival, le jazz plus conventionnel. Le pianiste de renom était accompagné de 3 autres musiciens, et à les voir aller, le jazz allait de soi. Il n’était pas difficile de remarquer la complexité de leur œuvre, elle sautait bel et bien aux yeux, mais elle semble relever du naturel, simplement.



Les pièces étaient dignes des grands jazzmen. On y retrouvait solos virtuoses, rythmes compliqués, constructions harmoniques habiles, et le tout gardant des nuances bien présentes. Franck Amsallem a étalé à aux auditeurs sa grande compréhension et sa maîtrise ce genre musical : ''Le jazz est très très complexe, c'est difficile d'apprendre ça tout seul'', a-t-il dit en entrevue après le spectacle. Avec sa performance, il y avait de quoi contenter les connaisseurs.



Si c’étaient les compositions instrumentales qui étaient à l’avant-plan, ils ont tout de même servi une chanson au public. Si tous les bons pianistes ne peuvent pas se permettre de chanter, Franck Amsallem, lui, le peut. Sa voix allait bien avec le standard choisi.



Amsallem a clos la soirée avec sa toute première composition, qu’il avait créée il y a de cela une trentaine d’années, a-t-il mentionné. En entrevue, il s’est dit content de cette première visite au Sénégal, puisque l’Afrique est le berceau du jazz et que ‘‘c’est génial d’entendre la musique à sa source’’.


Caroline Beauchamp (stagiaire)



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