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Dr Arona Coumba Ndofféne Diouf, ministre-Conseiller spécial du président de la République : « En exploitant l’eau du fleuve, le Sénégal peut devenir le grenier de l’Afrique de l’Ouest »

Dimanche 24 Août 2014

Transatlantic Smart Award 2014 décerné par les Etats-Unis, tous les trois ans, aux scientifiques qui se sont distingués par leurs recherches, leurs travaux, leurs publications et leurs enseignements dans les universités américaines et du monde, Arona Ndoffène Diouf, par ailleurs ministre-conseil du président de la République en charge de l’environnement, des mines, de l’agriculture et de l’énergie, revient, dans cet entretien, sur le sens de cette distinction et les perspectives qui s’offrent à lui sur le plan scientifique.


M. le ministre, quel sens revêt, pour vous, cette distinction ?

Tout d’abord, je dois témoigner une gratitude sans limites aux Etats-Unis de m’avoir récompensé pour les services que j’ai rendus durant mes 20 ans de travaux de recherche et d’enseignement dans leur pays. C’est un honneur pour moi parce que cela récompense tous mes efforts dans le domaine des sciences, de l’éducation. J’ai écrit des programmes qui sont enseignés aujourd’hui dans les lycées, collèges et universités des Etats-Unis. Tout cela fait que ce prix est une consécration pour moi dans la mesure où j’en tire une satisfaction qui témoigne des efforts que j’ai fournis durant toutes ces années.

De manière spécifique, sur quoi avez-vous travaillé pour mériter ce Prix ?

J’ai enseigné pendant 20 ans aux Etats-Unis tout en faisant des recherches. En 2003, j’ai inventé une méthode de purification et de traitement des eaux usées qui est aujourd’hui utilisée en Inde, au Japon et dans certains Etats aux Etats-Unis. C’est ce qui m’a permis de faire des conférences internationales et aussi de donner des cours dans ce domaine. De plus, j’ai participé à plusieurs recherches avec la Nasa sur la vie extraterrestre en identifiant des météorites arrivées sur la terre et qui peuvent donner des signes de vie par exemple des bactéries. C’est ce qu’on appelle le palé-environnement. En plus de cela, je suis spécialiste de la valorisation des minerais. Tout cela fait que j’ai été primé par un panel choisi par le Sénat américain et le Congrès américain qui constitue un institut à but non lucratif qui s’appelle Smart et à qui on a donné la mission d’identifier les scientifiques qui se sont distingués dans leurs domaines et pour les services rendus aux Etats-Unis et au monde.

Votre méthode de purification et de traitement des eaux usées est utilisée au Japon, en Inde et aux Etats-Unis, vous dites. Pourquoi vous ne l’appliquez pas au Sénégal ?

C’est un manque de volonté des autorités sénégalaises. Ce que je peux faire, c’est mettre à leur disposition mes connaissances. Et c’est ce que j’ai fait avec le président Abdoulaye Wade. Puis que je fais aussi de la valorisation des sols, je lui avais remis un programme qui s’intéressait à l’eau et à l’irrigation au Sénégal et qui faisait au moins 375 pages. Dans ce programme, j’ai proposé l’irrigation du fleuve Sénégal en eau potable. Imaginez-vous, le Sénégal n’a pas une bonne eau. L’eau avec laquelle on nous alimente n’est pas une bonne eau. En ce sens que c’est de l’eau souvent tirée du Lac de Guiers, lequel ne répond pas à toutes les normes standards de consommation. Soit parce que dans certaines zones la nappe est saturée de métaux lourds, de sulfure ou de calcite qui impactent sur la santé des populations, dans d’autres zones, la surexploitation de la nappe fait qu’il y a une substitution de l’eau de mer à l’eau fraîche. Tout cela fait donc que nous avons besoin d’un programme urgent d’eau. Et ce programme ne peut se baser que sur l’exploitation de l’eau du Fleuve Sénégal qui fait 1.700 km. J’ai toujours donné l’exemple du fleuve Baltimore qui est six fois plus petit que le fleuve Sénégal et pourtant qui alimente en eau potable et en eau d’irrigation 7 Etats aux Etats-Unis pour une population qui fait onze fois celle du Sénégal. Le potentiel est donc là, il suffit juste de l’exploiter.

Vous avez proposé ce programme au président Abdoulaye Wade, dites-vous. Qu’en-est-il du président Macky Sall ? Lui avez-vous présenté le programme?

J’ai fait la même chose. Et puis, quand je proposais ce programme au président Wade, l’actuel président était alors Premier ministre et je lui avais remis une copie. Et j’ai refais la même chose quand il m’a choisi comme Conseiller. Dans mes notes et conseils que je lui donne, j’ai toujours dit que nous devions arrêter la surexploitation de la nappe aquifère sénégalaise dans toutes ses parties et sur tout le territoire national et commencer à exploiter l’eau du Fleuve Sénégal qui est une eau fraîche. Et chaque seconde que Dieu fait, nous perdons des millions de mètres cubes d’eau fraîche qui se déversent dans l’océan. Maintenant, ce programme que j’ai proposé comporte un volet irrigation. Aujourd’hui, nous en sommes à peu près à 70.000 km 2 de terres irriguées alors que le potentiel du Fleuve Sénégal peut être étendu jusqu’à 1,5 million de km2. Cela permettrait au Sénégal de devenir le grenier de toute l’Afrique de l’Ouest.

Exploiter l’eau du Fleuve Sénégal c’est bien, mais encore faudrait-il tenir compte des intérêts de la Mauritanie avec qui nous avons en partage ce fleuve. D’autant plus qu’il y a quelques années, ce pays s’était braqué quand la revitalisation des vallées fossiles avait été soulevée ?

Les Etats riverains sont incontournables dans l’exploitation du Fleuve Sénégal. Vous pensez que ces Etats riverains refuseront un programme d’irrigation qui pourrait rendre le littoral et ses déversants aussi fertiles au point de nourrir toute la population de l’Afrique de l’Ouest ? Non, je pense qu’ils ne refuseront pas. On partage déjà certains barrages, à savoir ceux de Manantali avec l’Omvs, de Caleta entre le Mali, la Guinée, la Gambie et le Sénégal avec l’Omvg. On va vers le barrage de Sambagalou dont les fonds ont été déjà mobilisés et qui pourra fournir de l’électricité jusqu’à 200 mégawatts.

Vous avez dit tout à l’heure que le Prix qu’on vous a décerné était aussi une façon de récompenser les services que vous avez rendus aux Etats-Unis. On a l’impression que les intellectuels sénégalais servent plus les autres pays que leur propre pays. Qu’en dites-vous ?

Et si le Sénégal n’a pas besoin de nous ? On doit manger donc, on vend nos connaissances à l’extérieur. Je crois qu’il y a un mépris de nos dirigeants par rapport aux fils du Sénégal qui ont la capacité intellectuelle et scientifique de développer le Sénégal. Je ne suis pas le seul. Aux Etats-Unis, on compte jusqu’à une centaine de professeurs, d’enseignants sénégalais qui sont dans les laboratoires, dans les universités, dans les lycées, etc. A travers le monde, on peut compter au moins un millier ou plus de Sénégalais occupant des postes très importants dans l’industrie, dans les finances et dans d’autres secteurs de pointe. Malheureusement, il y a une attitude de mépris des dirigeants de notre pays par rapport à ces Sénégalais.

Le fait que le président Macky Sall ait fait appel à vous, n’est-ce pas là une volonté de profiter de l’expertise de ces Sénégalais dont vous vantez les compétences ?

Je pense bien. Je crois qu’il y a une volonté affichée de sa part. Personnellement, être dans le Cabinet du président de la République, c’est un honneur, mais servir le Sénégal aussi est hautement plus important que


Le Soleil