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Que cache le projet de loi sur la réforme des «daaras» ?

Vendredi 2 Janvier 2015


Le gouvernement du Sénégal, en la personne de M. Serigne Mbaye Thiam, ministre de l’Education nationale, sillonne les foyers religieux pour leur faire avaler la couleuvre de ce qui est appelé : «Le Projet de statut des daaras».


Il ne s’agit ni plus ni moins que d’une réforme visant à transformer les daaras en officines propres à fabriquer des Sénégalais «tarés», coupés de leurs racines islamiques et sevrés du breuvage immunisant du saint Coran…Sous le prétexte de vouloir combattre la mendicité et contrôler les sources de financement des «daaras», pourtant laissés pour compte et exclus du système éducatif national, le gouvernement que dirige Mahamad Boun Abdallah Dionne initie une réforme à la Jules Ferry, c’est-à-dire une réforme qui déboucherait sur une école sans Dieu.A l’évidence, les «daaras» ont existé au Sénégal bien avant l’école française. Aux 19ème et 20ème siècles, le colonisateur français, gêné par la recrudescence des «daaras», s’est engagé dans une entreprise diabolique visant à faire disparaître systématiquement ce type d’enseignement islamique. Des dizaines de maîtres coraniques furent ainsi froidement abattus à Malem Hodar, sous le fallacieux prétexte que ces derniers tentaient «une révolte des marabouts».D’autres chefs religieux ont subi le même sort dans le cadre du plan de liquidation programmée des «daaras», prélude à la mission d’assimilation et d’intégration des autorités coloniales.Le 22 juin 1857, le gouverneur général de l’Aof (Afrique occidentale française), Louis Faidherbe, prit un décret dont l’objectif inavoué n’était rien d’autre que d’affaiblir l’enseignement arabo-islamique en faveur de l’enseignement du français. Ce décret stipulait que tout prétendant à l’enseignement du saint Coran devait satisfaire les conditions suivantes :-Adresser une demande d’autorisation au gouverneur général ;-Etre natif de Saint-Louis ou y avoir résidé pendant au moins 7 ans ;-Fournir une attestation de bonne vie et mœurs ;- S’engager à envoyer au cours du soir français ses «talibés» âgés de 21 ans au plus.Une simple comparaison des objectifs poursuivis nous permet de comprendre que le projet de loi  du Président Macky Sall ressemble, comme deux gouttes d’eau, à la fameuse loi de 1857, inspirée par le gouverneur général colonial, Louis Faidherbe. Les deux textes législatifs ont pour dénominateur commun : l’introduction obligatoire de l’enseignement du français dans les «daaras»…Par ailleurs, le projet de loi du Président Macky Sall remet le contrôle pédagogique des «daaras» entre les mains de l’Inspection académique qui, elle-même, relève de la tutelle du ministère de l’Education nationale. Le fameux Conseil consultatif des daaras (Ccd) est managé par un secrétariat exécutif, désigné par le ministère de l’Education nationale, alors que sa composition reste largement dominée par les structures de l’Etat.
Des motivations suspectesDans l’exposé des motifs du projet de loi sur le statut des «daaras», le gouvernement décline sans ambages ses objectifs et motivations au travers cette réforme :-Lutter contre la mendicité des «talibés» par des lois et des décrets ;-Contrôler les sources de financement privé des «daaras» ;-Laïciser progressivement les «daaras» via l’introduction obligatoire des programmes de l’école laïque.Dans le Projet de loi concocté par le gouvernement, aucun des objectifs ou moyens dégagés pour les atteindre ne cadre avec les buts qui président à l’érection des «daaras» par nos valeureux ancêtres. En outre, la mendicité, qui n’est pas l’apanage des «talibés» dans notre société, ne pourrait être combattue par l’adoption de simples textes législatifs… Elle découle de conditions socioéconomiques, marquées par un appauvrissement honteux des couches les plus vulnérables de la société, et aggravées par la démission quasi-totale de l’Etat face à ses obligations régaliennes de prise en charge des préoccupations primaires des populations. Pour éradiquer le phénomène de la mendicité, il faudrait enclencher un élan de solidarité et de partage à large échelle et actionnant des leviers islamiques, tels que le Waqf et la Zakat. Curieusement, à ce niveau, le gouvernement du Sénégal ne cesse de traîner les pieds en dépit des énormes efforts financiers consentis en sa faveur par des institutions internationales comme la Banque islamique de développement, qui visait à donner à notre pays le statut de «pays pilote», notamment dans la sous-région d’Afrique de l’Ouest.A l’instar de la Fondation de l’imam Khomeini (Imdad), qui a fait ses preuves en République islamique d’Iran, un projet de création d’une fondation nationale d’appui aux daaras avait été initié au Sénégal depuis 2011, mais ce projet fut, semble-t-il, emporté par la vague beige-marron de «ruptures» qui a fini d’envoyer aux oubliettes le fameux principe de la continuité de l’Etat…Le ministre de l’Education nationale, Serigne Mbaye Thiam, disait l’autre jour à l’endroit de la famille omarienne et aux autorités religieuses de Médina Gounass que l’Etat a adopté dans l’élaboration du Projet de loi pour la modernisation des «daaras» une démarche participative. Comme si le ministre Serigne Mbaye Thiam feignait d’oublier qu’une telle approche aurait commencé par impliquer les principaux concernés dès la phase d’identification des besoins, en passant par la recherche commune des solutions pour, enfin, aboutir à l’élaboration du projet. Or, dans le cas d’espèce, le gouvernement a conçu son projet en solo pour ne pas dire en catimini, avant de le soumettre, de manière précipitée, à quelques familles religieuses, en vue de recueillir leur bénédiction, sous les projecteurs de la télé. C’est là une démarche très politicienne qui tend à masquer la face hideuse d’un projet de loi qui ne diffère en rien de la fameuse loi de Jules Ferry…Si le gouvernement manifeste la volonté de lutter contre le terrorisme par le contrôle des sources de financement des «daaras», cela signifierait qu’il adopte dans ce domaine les mêmes méthodes que les gouvernements occidentaux qui considèrent que les «daaras» sont les terreaux naturels du terrorisme. S’il est vrai que notre pays vient d’abriter, en novembre 2014, «le meilleur» sommet de la Francophonie, cela ne devrait pour autant signifier que l’argent du contribuable sénégalais devrait être prioritairement utilisé pour la promotion de l’enseignement du français, au détriment d’autres langues plus importantes pour le Sénégalais lambda, telles que la langue arabe ou les langues nationales. Cela, au moment où des pays africains comme le Rwanda et le Gabon optent résolument pour l’intensification de l’enseignement de l’anglais au détriment de la langue de l’ancien colonisateur, qu’est le français.Dans ce projet de loi pour la modernisation des «daaras», le gouvernement ne dégage clairement aucun moyen financier pour appuyer ces structures d’enseignement du saint Coran, il se réfugie plutôt derrière des terminologies aussi vagues que «les daaras peuvent bénéficier…». En vérité, une volonté politique sincère d’appuyer les «daaras» aurait commencé par dégager des mesures d’accompagnement concrètes, via la mise en place d’un fonds permettant de mener à bien une politique efficiente de promotion des «daaras». Le Pse n’a pas démarré avec des textes législatifs, mais a été fondé sur un plan clairement élaboré, où des objectifs ont été définis ainsi que des moyens colossaux pour les atteindre. La réorganisation effective des «daaras» passerait nécessairement par cette voie. Dans une telle démarche, l’on ne saurait occulter  l’implication des hommes de l’art, autrement dit, les Serignes daaras, en amont comme en aval, du processus.En définitive, ce projet de loi est aussi dangereux que le fameux projet de loi du 23 juin 2011, lorsque l’ancien Président Abdoulaye Wade a voulu introduire dans notre loi fondamentale des modifications constitutionnelles majeures, sans avoir recueilli auparavant l’assentiment du Peuple sénégalais. Encore une fois, le gouvernement est invité à ne jamais déposer ce projet de loi, au cas contraire, le Peuple et ses députés seront obligés à prendre leur responsabilité devant Dieu et devant l’histoire… A bon entendeur salut !
Mamadou Bamba NDIAYE 
Ancien Ministre bambandia49@yahoo.fr