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Couvrir Ebola inquiète les journalistes parfois plus que la guerre

Samedi 18 Octobre 2014

Des agents sanitaires revêtent leurs équipements de protection avant d'aller voir des malades atteints par le virus Ebola à l'hôpital de Monrovia, le 1er septembre 2014



Pour beaucoup de journalistes, couvrir Ebola est plus inquiétant que couvrir une guerre, surtout parce qu'ils craignent de contaminer leur entourage. Et au retour, ils se retrouvent parfois confrontés aux peurs de collègues ou d'amis qui les évitent.

"On a moins de difficultés à trouver des journalistes pour aller en Irak ou en Centrafrique que pour aller sur des terrains comme cela. Il y a un fantasme de l'épidémie", souligne Claire Hédon, qui revient de Guinée pour la radio RFI.

"Certains journalistes qui ont l'habitude des conflits ne se sont pas portés volontaires pour des raisons familiales", explique Sofia Bouderbala, adjointe à la rédactrice en chef Europe Afrique de l'AFP. "C'est une menace invisible, alors que sur les terrains de guerre, l'obus, on le voit tomber".

"Ces sujets sont très stressants à couvrir car vous ne voyez pas l'ennemi", confirme John Daniszewski, rédacteur en chef international de l'agence américaine Associated Press.

Une fois arrivés, les journalistes, qui, comme les soignants et les humanitaires, vont au plus près des foyers d'épidémie, suivent les consignes sanitaires : gants, masques, lavages constants des mains au chlore et interviews à bonne distance.

"La règle de base : on ne touche rien, ni personne. Et deux semaines sans toucher personne, c'est bizarre", raconte Marc Bastian, reporter à l'AFP, revenu de Monrovia.

"On est partis avec des litres de désinfectant. On se vaporise les chaussures à la Javel, on se lave les mains 40, 50 fois par jour. Les photographes utilisent des téléobjectifs pour photographier des malades et moi-même, j'ai interviewé quelqu'un à huit mètres en hurlant", relate-t-il.

"On peut totalement travailler sur ces zones et ces sujets. C'est contraignant et sinistre, mais c'est possible sans danger", conclut-il.

"Pour faire du son, on utilise un micro perche, on évite le contact", renchérit Yves Rocle, directeur adjoint Afrique à RFI.

"J'ai interviewé des malades à deux mètres, distance à laquelle on considère que vous ne pouvez pas choper le postillon", explique Claire Hédon, de RFI. Mais parfois l'attention se relâche: "très honnêtement, on lâche un peu la garde. Oui, j'ai fini par serrer des mains".

- Retour difficile -

Le retour du reporter peut être compliqué, car certains amis ou collègues craignent d'approcher ceux qui ont été au contact du virus. Et mentionner sur Facebook que l'on revient d'un reportage d'Afrique peut faire le vide autour de vous.

"En revenant, on prend sa température pendant 21 jours, la durée d'incubation, et on s'inquiète à la moindre alerte. Et on a pas une vie sociale très développée: il y a des gens qui refusent de vous serrer la main ou de vous voir, alors que sans fièvre, on n'est pas contagieux", regrette Guillaume Lhotellier, parti en Guinée pour la société de production Elephant.

"On dit qu'il y a en Afrique une peur irraisonnée, mais c'est la même chose chez nous", confirme Elise Menand, de France Télévisions, de retour du Libéria.

A la BBC, des maquilleuses ont eu peur de devoir s'occuper d'invités arrivant de Guinée, a raconté la présentatrice Fiona Bruce, citée dans The Telegraph.

"Mais on a une responsabilité. Nous qui sommes allés sur ce terrain, on pourrait ramener la maladie. Donc, c'est normal de se protéger soi et les autres. Il faut respecter l'appréhension de l'entourage", estime Florian Plaucheur, d'AFPTV, de retour de Sierra Leone.

Les grands médias sont divisés sur l'idée d'une mise en quarantaine systématique de leurs journalistes revenus d'Afrique pendant les 21 jours d'incubation.

L'AFP et la BBC y sont opposées. "Nos journalistes ont respecté nos consignes de protection très strictes sur place. Ils ne constituent pas un risque pour leur entourage puisqu'ils ne présentent pas les symptômes de la maladie. Des inquiétudes se sont exprimées dans la rédaction, mais nous avons autorisé les journalistes à revenir après leur repos. Il n'y a pas lieu de leur imposer une quarantaine alors qu'ils ne représentent aucun danger. Nous ne voulons pas céder à la psychose", a déclaré Michèle Léridon, directrice de l'information de l'AFP.

A la BBC, "il n'y a pas de quarantaine et les gens qui ne présentent pas de symptômes peuvent entrer dans nos locaux", a expliqué un porte-parole.

En revanche, AP demande systématiquement à ses journalistes de retour d'Afrique de rester trois semaines chez eux, a expliqué John Daniszewski. "Oui, ils doivent rester chez eux, isolés. Quelqu'un qui ne présente pas de symptôme n'est pas contagieux mais nous voulons éviter tout risque".

© 2014 AFP


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