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Lu pour vous : Fatou Lo Niang, pionnière en intelligence artificielle au Sénégal

Mardi 19 Décembre 2023

La doctorante veut développer une application permettant aux cardiologues de prédire les risques de maladies cardio-vasculaires.


C’est un peu par hasard que Fatou Lo Niang, doctorante en intelligence artificielle (IA) appliquée à la médecine, s’est mise à étudier l’informatique. Son baccalauréat en poche, en 2014, elle est orientée par le ministère de l’enseignement supérieur vers l’université de Bambey, à environ 130 kilomètres à l’est de Dakar, pour suivre une licence en réseaux téléinformatiques et maintenance, puis un master en système informatique. Bien loin de ses premiers choix, qui étaient la médecine et la biologie.

« J’étais passionnée par les sciences naturelles depuis toute petite. J’ai eu du mal à accepter ce choix qui m’était imposé et j’ai eu des difficultés à m’adapter », se rappelle la scientifique âgée de 30 ans, originaire de Thiaroye Gare, dans la banlieue de Dakar.

Elle décide alors d’utiliser sa formation pour revenir à ses premières amours au moment de choisir, en 2021, son sujet de mémoire. « J’ai découvert que l’informatique était applicable à beaucoup de domaines, dont la médecine », explique Fatou Lo Niang. Elle se penche sur une application de gestion des patients en cardiologie à l’hôpital régional de Saint-Louis. « Je devais introduire de l’IA dans mon mémoire. Grâce aux données que j’avais sur les patients, l’idée était de prédire les résultats pour juger de l’utilité de faire passer un scanner, qui est un examen onéreux. Les prédictions étaient fiables, mais nous n’avons pas pu déployer la partie IA, car l’hôpital ne disposait pas du serveur nécessaire », précise-t-elle.

Une fois diplômée, elle a voulu continuer dans la recherche avec une thèse sur l’IA appliquée aux maladies cardio-vasculaires, afin de mieux les prévenir. Au Sénégal, ces maladies représentaient 17 % de l’ensemble des décès en 2018, selon l’Organisation mondiale de la santé. « Elles sont mal prises en charge, déplore la chercheuse. L’idée est d’inverser la tendance grâce à l’IA. » Cette fois, elle est encadrée par l’université Gaston-Berger de Saint-Louis, au sein du laboratoire d’analyse numérique et informatique.

Améliorer la connaissance des facteurs de risque

« Nous souhaitons déployer une application dans laquelle les cardiologues vont entrer les données de chaque patient afin de prédire les risques de maladies cardio-vasculaires et de les prendre en charge de façon précoce, si nécessaire. Par exemple, un individu peut paraître sain alors qu’il a déjà développé un début d’accident vasculaire cérébral », détaille Fatou Lo Niang. Grâce à l’intelligence artificielle, elle espère pouvoir améliorer la connaissance des facteurs de risque et, donc, identifier les stratégies de prévention à mettre en place. Car l’objectif de la scientifique est de trouver des solutions concrètes pour son pays.

Sur le continent africain, à part dans certains pays anglophones comme l’Afrique du Sud ou le Nigeria, la doctorante observe que les travaux sur l’utilisation de l’IA en médecine sont encore limités, souvent restreints à la lutte contre les cancers et le paludisme. « Nous n’avons pas de données africaines, nous devons nous baser sur celles qui viennent d’Europe ou des Etats-Unis. Mais nous ne pouvons pas prédire une maladie avec des données qui ne nous concernent pas ! », regrette Fatou Lo Niang.

Lauréate 2023 de la Fondation L’Oréal, elle a trouvé les financements nécessaires pour collecter des données dans différentes régions du Sénégal sur les cardiopathies rhumatismales – maladie présente dans les pays en développement ou sous-développés, qui touche les enfants de 5 ans à 15 ans. « Nous sommes déjà en collaboration avec des hôpitaux à Dakar et à Saint-Louis, mais nous aimerions aussi faire des collectes auprès des écoles », explique la doctorante.

Après sa thèse, Fatou Lo Niang souhaiterait continuer à faire de la recherche « pour ne pas [se] limiter à [ses] connaissances ». Des rêves qu’écoute avec admiration son mari, Ismaila Diouf. « Etre femme et scientifique au Sénégal est difficile, car cela nécessite de longues années d’études », assure-t-il. Si les filles sont majoritaires dans le primaire et le secondaire, elles sont moins présentes à l’université, surtout en master et en doctorat. « Elle a su s’adapter et rebondir en gardant son objectif en tête », résume Ismaila Diouf. Car, si elle n’a pas pu faire des études de médecine, Fatou Lo Niang compte bien marquer les services de cardiologie sénégalais.

Cet article fait partie d’un dossier réalisé dans le cadre d’un partenariat avec la Fondation L’Oréal. Par Théa Ollivier( Dakar, correspondance) pour Le Monde
 


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