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Centenaire des chemins de fer à Thiès : La Cité déraille vers la décadence

Samedi 19 Octobre 2019

Le chemin de fer au Sénégal vit-il ses derniers instants ? Le transport ferroviaire reste confronté dans notre pays à de sérieuses difficultés financières et d’exploitation qui menacent sa pérennité. Entre autres, des infrastructures agonisantes, une baisse constante du chiffre d’affaires ; d’où la question de l’heure : «Que reste-t-il du chemin de fer» ? Le Quotidien a tenté de percer le mystère, après le démantèlement des rails qui a provoqué l’exode rural et la paupérisation de plusieurs villes.


Centenaire des chemins de fer à Thiès : La Cité déraille vers la décadence
«Les rails souffrent. Les locomotives suffoquent. Le chemin de fer reste condamné.» Ce cri de détresse mesure à sa juste valeur l’ampleur du désespoir qui s’est emparé de la Capitale du Rail, face à la mort programmée du chemin de fer. Dans la ville aux deux gares, ces braves bouts de bois de Dieu (cheminots) ne dorment plus la nuit à poings fermés, semblent bien avoir raison de s’inquiéter. Si ce mode de transport, malgré les épreuves du temps, constitue l’épine dorsale de tout système de transport dans un pays évolué, au Sénégal, malheureusement, le manque d’investissements structurants combiné au développement tous azimuts de réseaux routiers et l’apparition des camions gros porteurs ont fini d’installer une concurrence rail/route à laquelle le chemin de fer n’a pu répondre efficacement.


Ce qui a entraîné le déclin du trafic ferroviaire sénégalais. En effet, au lendemain de son accession à la souveraineté internationale, le Sénégal était parti pour disposer d’un des réseaux ferroviaires les plus denses en Afrique. Outre l’axe ferroviaire international qui le reliait à la République du Mali, quatre autres desservaient l’intérieur du pays. Le premier de ces axes est le tronçon Dakar-Thiès-Saint Louis qui date de 1885 et qui, d’une longueur de 263 kilomètres, est la première ligne ferroviaire construite en Afrique noire française.

Son exploitation sera d’un grand apport dans l’urbanisation et le développement économique à l’intérieur du pays. Des villes ont en effet commencé à émerger le long de la ligne ferroviaire principale, des gares dites primitives de Saint-Louis et Tivaouane construites en 1905 et celles de Kelle et Louga ont vu le jour en 1908.

D’autres agglomérations naîtront par la suite aux différents points d’arrêt du train, entraînant la création d’autres gares. Des villes et faubourgs dont la principale activité génératrice de revenus étaient intimement liés aux rails. Outre le trafic voyageur, les trains de marchandises permettaient de transporter les produits de l’intérieur vers les centres urbains, développant ainsi le commerce intérieur.


Le bassin arachidier ne sera pas en reste. Mettant à profit les installations ferroviaires de l’axe Dakar-Bamako, l’Administration coloniale mit en circulation des trains voyageurs et de marchandises sur le tronçon avec l’installation de gares à Diourbel, Kaolack, Tambacounda et Kidira. Plus tard, la ligne Louga-Dahra-Linguère vit le jour.

Le maillage était alors presque complet. Toutes les régions, hormis la Casamance et le Fouta, étaient desservies et une activité commerciale des plus intenses se développait le long de ce réseau en pleine effervescence. En plus des emplois directs, l’entreprise ferroviaire était génératrice d’une masse importante d’emplois indirects.

En atteste tout le commerce qui se développait autour des différentes gares ferroviaires. Le cœur économique de toutes les villes installées le long de la voie ferrée battait au rythme des trains voyageurs et de marchandises. Le chemin de fer avait engagé son plein envol avec une extension de son réseau jusque dans la cité religieuse de Touba. Et dans cet envol, la région de Louga était la mieux servie en matière d’infrastructures pour être desservies par deux axes, à savoir Dakar-Louga-Saint Louis et Louga-Dahra-Linguère.

Cependant, et ironie du sort, c’est dans cette région que le mal a commencé. Pour des raisons d’ordre économique, la direction générale de la Régie des chemins de fer décida en 1978 de l’arrêt du trafic sur l’axe Louga-Dahra-Linguère. La suppression de ce tronçon surviendra deux ans plus tard. Une suppression suivie de l’enlèvement de la voie ferrée. Les conséquences n’ont pas tardé à se faire sentir dans toute la région naturelle du Ferlo. Des cités comme Coky, Warkhokh, Moukhmoukh, entre autres, ayant atteint un certain niveau de prospérité, ont alors commencé à progressivement sombrer dans l’enclavement, la pauvreté et l’anonymat.

Et la gangrène continua ses ravages avec la suppression de l’axe Thiès-Louga-Saint Louis. Il ne restait alors du réseau ferroviaire que l’axe Dakar-Thiès-Kidira qui ne dut sa survie qu’au train voyageur Express qui relève du corridor Dakar-Bamako. Mais c’était sans compter avec la volonté des institutions financières internationales de pousser les autorités sénégalaises et maliennes à la privatisation de ce secteur. En effet, face aux difficultés réelles de gestion et d’investissement et leurs corolaires de dégradation très avancée des infrastructures et du matériel roulant, les deux Etat se virent dans l’obligation de céder à la pression des bailleurs. On était en 2003.

Hormis le tronçon Dakar-Thiès exploité par le Petit train de banlieue (Ptb), ce qui restait du réseau ferroviaire sénégalais venait de faire l’objet d’une concession pour une durée de 25 ans. La Société nationale des chemins de fer du Sénégal (Sncf) avait cédé la place à une binationale, Transrail Sa, avec une direction générale basée en terre malienne.

Du Dakar-Niger à la société Dbf

Les Etats sénégalais et maliens ont mis fin à la concession du corridor Dakar-Bamako qu’ils avaient signée avec le groupe Advens en décembre 2015. Une décision qui marque le début de l’entrée en vigueur du nouveau schéma institutionnel défini par les deux Etats pour assurer la relance de ladite ligne de chemin de fer. Laquelle ligne, en bute à la vétusté de ses installations fixes et de son matériel roulant, couvre un parcours de 1 287 kilomètres, allant de Dakar à Bamako. Ce corridor est ce qu’il reste du projet de construction de la ligne de chemin de fer initié par l’Administration coloniale qui ambitionnait de relier le port de Dakar au fleuve Niger afin de faciliter l’acheminement des matières premières vers la France.

La mise en exécution de ce projet qui a commencé en 1904 avec la construction du tronçon Kayes-Koulikoro au Mali a été finalisée vingt ans après. La ligne allant de Dakar à Koulikoro était ainsi fin prête en 1924. Ainsi, le trafic marchand et voyageur entre les deux localités par voie ferroviaire était assuré. Il en sera ainsi jusque dans les années 60 avec les indépendances et l’éclatement de la Fédération du Mali. La Régie des chemins de fer de l’Afrique de l’Ouest sera alors scindée en deux compagnies bien distinctes : la Régie des chemins de fer du Sénégal (Rcfs) et celle du mali (Rcfm).

Une scission qui ne sera que de courte durée puisque deux ans plus tard, les deux Etats conviendront à un accord sur une exploitation commune du corridor ferroviaire. Lequel accord dans sa gestion sera de mise pendant un peu plus de quatre décennies. Et ce, malgré les difficultés liées à la forte concurrence du transport routier, mais aussi et surtout au manque d’entretien et d’investissement sur la voie ferrée et le matériel roulant. Une situation à laquelle est venu s’ajouter l’endettement chronique des deux Etats maliens et sénégalais qui n’arrivaient plus à accéder aux crédits devant leur permettre de conserver le monopole sur le transport ferroviaire.

Les institutions financières internationales comme la Banque mondiale et l’Agence française de développement leur opposaient la condition d’une privatisation du secteur au prêt de 61,6 millions d’euros qu’ils sollicitaient. L’idée préconisée par ces deux institutions financières reposait alors sur une gestion public-privé de cette ligne ferroviaire binationale. Le choix n’était pas permis. La suggestion sonnait comme un ordre et il fallait s’y accommoder. Alors le processus de privatisation fut enclenché sous forme d’un appel à manifestation d’intérêt pour une concession intégrale. On était en février 2001. Deux ans plus tard, plus précisément le 11 février 2003, le groupement Cac-Getma se voit attribuer la concession à titre provisoire pour une enveloppe financière de 15 milliards de francs Cfa.


Une concession provisoire qui ne tarde pas à passer au définitif pour une durée de 25 ans à partir de mars de la même année. La société de chemin de fer Transrail Sa venait ainsi de naître avec 51% des parts. Le reste des actions est réparti entre les deux Etats du Sénégal et du Mali, les actionnaires privés de ces deux pays et les employés de la société. 13 ans après, la montagne de cette concession semble n’avoir accouché que d’une souris. Aucun des repreneurs qui se sont succédé à la tête de l’entreprise n’a pu trouver le remède à l’hémorragie qui vide Transrail de sa substance.

Laquelle entreprise, faute d’investissement sur la voie ferrée et le renouvellement du matériel roulant, est entrée en plein dans une phase de latence avec un trafic fortement réduit. Pour cause, les nombreuses critiques sur la voie et la vétusté criante des locomotives avec leurs corolaires de suppression du trafic voyageur et de baisse drastique des liaisons de trains de marchandises.

Ces difficultés ont amené des deux Etats à travailler sur la mise en place d’un schéma institutionnel qui consiste à la résiliation du contrat de concession et la mise en place d’une société de patrimoine dans chacun des deux Etats et d’un organe de régulation pour une meilleure gestion de l’axe ferroviaire.

Lequel schéma est aujourd’hui en phase d’exécution avec le départ de l’actionnaire principal du capital de Transrail et l’entrée en vigueur de la phase transitoire qui consacre la naissance d’une nouvelle entreprise dénommé «Dakar-Bamako ferroviaire», dont la gestion est confiée à Kibily Touré. Une sorte de retour à la case départ, plus d’un demi-siècle après les accords de 1962 qui consacrèrent l’exploitation commune du corridor ferroviaire Dakar-Bamako.

QUOTIDIEN



 


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1.Posté par DEBANO PIerre le 20/10/2019 09:51
Article très intéressant dans lequel on sent poindre un regret du colonialisme, du moins de sa partie positive, car il a aussi fait des dégâts dans d'autres domaines que ceux des chemins de fer, de la santé et de l'éducation. Les chemins de fer et les transports publics connaissent aussi en Afrique les ravages du Bling-bling comme en France, mais en Afrique, c'est rendu encore plus dramatique du fait de l'état des finances. Et effectivement, les organismes mondiaux de financement seraient bien inspirés d'en connaître plus du fonctionnement des transports publics qu'au travers des seuls fichiers Excel. Mais aussi, ceux qui en local critiquent des projets de transports publics, sur certains points avec juste raison, feraient bien de retirer de leurs discours les relents d'anti-colonialisme et ils seraient alors beaucoup plus efficaces dans leur contestation. Amitiés à tous ceux qui défendent et oeuvrent pour ce chemin de fer de la part d'un Français.

2.Posté par Malamine le 20/10/2019 14:30
Partie positive du colonialisme? Pour qui? Fatigant de lire ce genre de commentaires.

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