
Le Comité de commémoration du massacre des Tirailleurs sénégalais a accusé vendredi la France de dissimuler des documents historiques essentiels à la pleine compréhension du massacre de Thiaroye, survenu le 1er décembre 1944dans la banlieue de Dakar.
« Il y a des documents qui manquent, et nous savons pourquoi ils manquent. On ne peut pas comprendre qu’il y ait des soldats qui embarquent sans manifeste », a déclaré Rokhaya Fall, présidente de la commission Établissement des faits, lors d’une conférence de presse à Dakar.
Cette déclaration intervient au lendemain de la remise officielle du "Livre blanc sur le massacre de Thiaroye" au Président de la République du Sénégal.
Malgré les affirmations de la France selon lesquelles tous les documents disponibles auraient été remis, les chercheurs estiment que certains sont soit cachés, soit toujours inaccessibles, notamment en raison de restrictions d’archives liées à l’armistice de 1918.
Le professeur Mamadou Diouf, président du Comité du 80e anniversaire de la tragédie, a souligné la nécessité de « rouvrir les dossiers historiques du massacre », tandis que la sous-commission juridique travaille à la qualification du massacre comme un crime contre l’humanité.
Le Comité estime que si les recherches permettent de lever les incertitudes sur les violences subies, les familles des victimes pourraient ester en justice contre la France. Il évoque également la possibilité de revendications de réparations par les États ouest-africains, à l’instar d’autres précédents historiques, comme celui d’Haïti.
« L’ordre colonial était un ordre de violence, d’imposition du silence », a rappelé Ndiouga Bengha, enseignant-chercheur à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar.
Il a également évoqué les avancées des travaux sur le nombre de victimes : initialement estimé à 35, ce chiffre est aujourd’hui réévalué à plus de 70, grâce aux recherches archivistiques et archéologiques.
Moustapha Sall, président de la sous-commission Fouille archéologique, a confirmé que des fouilles tests ont été réalisées dans le cimetière de Thiaroye, précisant que « la réponse à ce qui s’est passé se trouve dans le sol ».
Ce travail de mémoire, porté par historiens, chercheurs et citoyens, vise à rétablir la vérité historique, à rendre justice aux tirailleurs, et à réhabiliter leur dignité dans l’histoire coloniale française.