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REFUGIES MAURITANIENS : Une grève de la faim «raccompagnera» le ramadan

Jeudi 9 Août 2012

En 1989, des douloureux événements ont opposé la Mauritanie et le Sénégal, entrainant du coup une crise entre les deux voisins. Cette crise s'est soldée par la rupture de leurs relations diplomatiques pendant plusieurs années, des dizaines de milliers de victimes dans les deux pays, des milliers de réfugies de part et d'autre, sans parler des répercussions non négligeables.


REFUGIES MAURITANIENS : Une grève de la faim «raccompagnera» le ramadan
Tout a commencé à Diawara, une localité du Sénégal oriental, ou des bergers Peulhs et les cultivateurs Soninkés se sont affrontés. Fin avril des centaines de Sénégalais sont tués ou mutilés à Nouakchott et dans plusieurs autres villes mauritaniennes, et lorsque les rapatriements ont commencé, les Maures ont fait l'objet de vives représailles à partir du 28 avril. À ce moment-là, le chiffre officiel est de 60 victimes. Chaque pays entreprend alors de rapatrier ses ressortissants, grâce à un pond aérien mis en place par la France, l'Algérie, l'Espagne et le Maroc. L’état d’urgence et le couvre-feu sont instaurés sur la région de Dakar afin de contenir une foule surexcitée. L'escalade est évitée. C'est en ce moment qu’Abdou Diouf président de la république du Sénégal demanda à l'armée sénégalaise de protéger les ressortissants mauritaniens en les amenant au bataillon du train afin de les rapatrier en Mauritanie. 160.000 Mauritaniens et 70.000 Sénégalais sont rapatriés à ce moment-là…

Depuis le 19 juin, c’est juste en face de l’immeuble Ferdinand Coly, abritant les locaux du Haut Commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés que les exilés Mauritaniens squattent un bâtiment en construction pour une grève de la faim illimitée. À coté, une banderole sur laquelle on peut lire : Coordination des Organisations des Réfugiés Mauritaniens au Sénégal pour le respect des conventions des Nations Unies et de l’Oit pour les réfugiés. Au tout début, ils étaient plus de 400. mais actuellement, ils ne dépassent pas la centaine. Hommes, femmes et enfants sont entassés sur des nattes de fortune à coté des barres de fer, des pierres mais aussi des planches en bois. Des groupes se sont formés çà et là ; les hommes d’un côté, et de l’autre, les femmes en compagnie de leurs enfants. Non loin d’eux, la seule latrine à ciel ouvert distille une odeur nauséabonde dès que le vent souffle dans la mauvaise direction.

L’heure de la rupture du jeûne approche. Les femmes s’activent à la vaisselle de fortune tandis que les hommes chauffent l’eau et partagent le pain. Dès que le muezzin proclame la rupture, ils s’organisent en cercles. La bonne humeur est de retour, l’heure est à la plaisanterie ; quelques minutes plus tard, tout le monde est en ordre pour prier.
Rencontré à sa place habituelle Aldiouma Cissokho, au beau milieu de quelques bagages et de ses provisions, le barbu à la soixantaine revient sur le motif de la suspension temporaire de la diète et fait l’historique de leur déportation :«Il d’abord remercier Allah le Tout-Puissant parce que pour tout musulman, avoir la chance d’être dans cette période de ramadan et de pouvoir jeûner est très important. Et surtout, pour nous, ramadan rime avec histoire, avec beaucoup de souvenirs car pour ceux qui ne le savent pas, en avril 1989, ça a coïncidé avec le mois béni de ramadan. Donc, en tant que musulman, nous avons jugé qu’il est nécessaire de laisser les personnes qui sont là de pouvoir faire valoir leur droit à la religion musulmane».

Les difficultés sont indéniables mais il rassure : «heureusement, à tout niveau de la vie, il y a de l’humanisme, il y a des collègues et des populations sénégalaises qui viennent la nuit nous donner du pain, du lait, sucre, des plats préparés ; on a une mosquée à Liberté 6 qui fait de son mieux pour nous aider». Les anomalies ? «On a parmi nous des diabétiques, des ulcéreux, des femmes qui allaitent, des enfants. Il arrive aussi, avec la chaleur, que les gens aient des nerfs tendus et, pour un oui ou pour un non, ils manifestent leur nervosité… Nous avons aussi vécu un cas de vol».

Ibrahima Ndiaye, membre de la cellule de la communication, n’y est pas allé par quatre chemins à propos de la Téranga sénégalaise tant vantée :«On dit que le Sénégal est le pays de la Téranga… C’est possible mais nous l’avons pas senti». Il préfère croire à la grandeur de leur combat :«notre lutte est noble ! Elle concerne toute une communauté. Elle n’a rien d’une lutte individuelle».

A sa suite, la présidente des femmes, Fatimata Ly, teint clair, tatouage aux lèvres, revient sur leur calvaire non sans pointer un doigt accusateur sur le Hcr :«c’est difficile ! Nous ne vivons que de dattes, de café, de thé… Pire, les autorités du Hcr ne nous viennent pas en aide, elles veulent que nous abandonnions la lutte, peut être raison pour laquelle elles sont restées sans réaction. Nos enfants sont là avec nous, ils souffrent terriblement. L’autre fois, il y avait une pluie accompagnée d’un fort vent, c’était tout simplement indescriptible».

Isolé dans son coin en quête d’air frais, Abderrahmane Sy, vêtu de sous-vêtement, malgré la fatigue qui l’habite, n’a pas manqué de revenir sur la passivité contradictoire du gouvernement sénégalais : «le gouvernement est en stand by. Je peux vous dire que le l’état-major particulier a organisé une réunion dans le département de Bakel dont le préfet nous a saisis avant-hier pour nous parler de cette réunion. Malheureusement, nous n’étions au courant de rien. Nous avons expliqué au Général Samba Fall qu’il nous fallait être informé dès le début pour pouvoir déléguer quelqu’un et nous faire comprendre de nos compatriotes qui sont dans la Vallée, ainsi que nous avons eu à le faire dans le département de Podor. Nous avons alors pu leur dire ce que nous vivons avec cette grève de la faim. Le général avait promis de nous téléphoner mais jusqu’à présent il n’a pas fait signe».

Le lendemain matin, malgré une forte canicule et un ciel nuageux, certains d’entre eux dorment encore à l’ombre d’un arbre. Ils ont passé la nuit à prier et à implorer les grâces des seigneurs. Ceux qui sont éveillés font des allers et retours vers Adama Diacko, un jeune handicapé physique qui dresse la liste des personnes désireuses d’aller en réinstallation. Toutefois, ces nouveaux locataires disent habiter avec des moustiques, des mouches mais aussi avec des rats qui les empêchent de dormir normalement.

Les refugies se disent déterminés à aller jusqu’au bout de leurs actions et affirment qu’après la korité, ils reprendront leur mot d’ordre s’il n’y a pas satisfaction de leurs doléances : la réinstallation pour de meilleures conditions de vie.

sud quotidien


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